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bassin houiller des Flandres, les contournemens sont beaucoup plus accusés au midi qu’au nord. Le pays de Galles offre des traits aussi inégaux, et d’après MM. Rogers, le massif entier des Apalaches présente une dissymétrie non moins frappante. De même des couches juxtaposées se disjoignent en quelques points, laissant entre elles des cavités qui parfois, dans les gîtes de plomb du Derbyshire par exemple, s’enrichissent d’amas métallifères. De même encore une assise que la compression fait butter contre un plan incliné s’infléchit pour en suivre la surface, comme les grès tertiaires de Suisse se courbent et plongent sous les couches renversées qui constituent le flanc septentrional des Alpes.

Les effets des refoulemens et des écrasemens latéraux en géologie ont fait l’objet d’une autre série d’expériences, moins précises par leur méthode, mais plus pittoresques dans leurs résultats. Le savant éminent qui, dans l’étude des environs du Mont-Blanc et la restauration des anciens glaciers des Alpes, continue si dignement la grande tradition d’Horace-Bénédict de Saussure, M. Alphonse Favre, a présenté au congrès géologique international de 1878[1] les résultats de ses ingénieuses recherches. Sur une bande de caoutchouc, longue de 0m, 40 mais étirée à 0m,60, on étend de l’argile pâteuse que retiennent aux extrémités deux arrêts en bois fixés au caoutchouc. Quand on abandonne celui-ci à son élasticité, il revient à sa longueur primitive[2]; la pâte, qui ne cesse d’y adhérer en même temps que les arrêts la refoulent, le suit dans son retrait. Si l’on a eu soin de tracer au préalable des lignes horizontales sur les faces de l’argile, elles dessinent alors les plissemens de la masse, dont la surface libre imite les accidens de relief

  1. Organisé sur le désir exprimé par un comité international de géologues réunis à Philadelphie en 1876, le premier congrès géologique avait surtout pour objet de préparer, pour la nomenclature des terrains et le figuré des cartes, une entente rendue chaque jour plus nécessaire par les progrès de la science en tous pays. Une courte session ne pouvait que poser les questions et en provoquer l’étude en vue d’un deuxième congrès. Celui-ci se tiendra en 1881, à Bologne, sous le haut protectorat de S. M. le roi d’Italie, qui porte un si vif intérêt au mouvement scientifique. Il a pour président d’honneur M. Sella, l’éminent minéralogiste, et pour organisateur le savant professeur de Bologne, M. Capellini, qui avait été l’un des promoteurs de ces réunions. Déjà de nombreuses et importantes adhésions sont arrivées d’Amérique, d’Allemagne et d’Angleterre. Tout fait espérer que la deuxième session rassemblera les représentans les plus autorisés de la science de la terre et qu’elle sera féconde en résultats pratiques.
  2. Beaucoup de montagnes ont subi une compression analogue. Par exemple, la coupe que M. Alphonse Favre a donnée des montagnes situées entre la Pointe-Percée et les environs de Bonneville montre que les couches plissées et contournées entre Dessy et le col du Grand-Bornand couvrent une longueur qui n’est que les deux tiers de celle qu’elles occupaient avant la compression