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sont largement répandues dans tous les massifs montagneux, et elles forment même des régions entières dans le nord de l’Europe et de l’Amérique. Longtemps on a voulu y voir les effets de courans boueux ou de causes aussi mal définies ; mieux interprétés aujourd’hui, à la lumière de l’expérimentation, ces témoins du passé racontent l’histoire des glaciers disparus.

Il est plus difficile de reproduire en petit, avec quelques conditions de similitude, les grands bouleversemens, ploiemens ou fractures, que l’écorce solide du globe a subis et qui se manifestent autant par les contournemens et les ressauts des couches profondes que par les accidens et les détails du relief apparent. Les imitations qu’on en peut tenter ne doivent jamais prétendre à autre chose qu’à éclairer, par des analogies plus ou moins prochaines, les causes de phénomènes mécaniques dont le calcul a été jusqu’ici impuissant à esquisser une théorie raisonnée. Hall, dans un exemple devenu classique, comprimait latéralement des feuillets d’argile ou des étoffes superposées ; il simulait grossièrement ainsi l’allure des assises tourmentées. M. Daubrée a rendu l’expérience méthodique. Un châssis de fer, muni de vis de pression, permet de refouler en divers sens, par l’intermédiaire de plaques de fer ou de bois, les couches très variées que l’on soumet à l’épreuve. zinc, tôle, plomb laminé, cire mélangée de plâtre ou de résine, matériaux rigides ou plastiques, alternance de couches différentes, tout a pu être étudié dans des conditions assez semblables à celles où se trouvent les sédimens. Uniformément comprimée sur toute sa surface, une couche pressée latéralement se bombe et s’infléchit en formant des plis de plus en plus nombreux à mesure que la poussée s’accroît. Si la compression verticale est inégalement répartie, si l’épaisseur ou la composition de la couche varient, la résistance plus ou moins grande à la déformation s’accuse avec une extrême sensibilité par une atténuation ou un renflement de plis. Enfin, si l’effort est suffisamment continué, le ploiement se renverse et un repli véritable se forme dans la couche. Ces résultats d’expérience semblent n’être que l’illustration des faits recueillis par l’observation. Il n’est pas nécessaire pour s’en convaincre de suivre sur le plan d’une mine de houille le tracé des ondulations et des renversemens des couches, non plus que d’étudier les profils dont les géologues ornent le bord de leurs cartes. Il suffit d’observer comment ces accidens se dessinent sur les tranchées des routes de l’Ardenne ou de la Bretagne, aussi bien que sur les abrupts des Pyrénées ou des Alpes. Toutes les diversités que comporte l’expérience se retrouvent dans la nature. L’inégalité entre les plis successifs d’un même faisceau de couches est notamment un fait souvent constaté. Ainsi, dans le