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qu’on s’occupât de questions politiques, et des proudhoniens, qui ne le voulaient point. Les premiers poursuivaient l’application des principes de l’unionisme, c’est-à-dire le relèvement du salaire par la coalition et la grève; les seconds visaient à réaliser leurs théories de reconstitution sociale. A Bâle, les proudhoniens ont succombé, mais en même temps l’élément unioniste était annihilé par les rivalités personnelles au sein du conseil général. A Paris, au contraire, les unionistes l’emportaient absolument sur les proudhoniens. En 1870 on aurait peut-être pu rétablir la concorde, mais la guerre y mit obstacle. Déjà, avant le congrès de La Haye, le conseil était divisé en deux partis hostiles, et quand il obtint le droit d’exclusion, il donna le coup de mort à l’ancienne association. »

L’Internationale des marxistes tint ses séances du 8 au 13 septembre. Marx lui-même n’y assista point. Il y eut une trentaine de délégués représentant l’Allemagne, la France, l’Angleterre, la Suisse et la Hollande. Ce qui montre le peu d’influence que l’association exerçait, c’est que l’Allemagne, où le socialisme prenait un si prodigieux développement, n’était représentée que par un seul délégué, Burckhart. S’il est seul, dit-il, c’est à cause des « frais considérables qu’entraîne l’envoi d’un représentant dans une ville aussi éloignée que Genève. » Ceci peint la situation. Les divers rapports présentés au congrès montrent les progrès des idées socialistes, mais n’indiquent pas qu’elles aboutissent à l’Internationale. Deux questions principales furent discutées : d’abord, les classes ouvrières doivent-elles prendre part aux luttes politiques, ou bien s’abstenir et préparer en silence la révolution sociale? On décida, comme déjà précédemment, qu’elles doivent s’occuper de la politique et au besoin s’alliera la bourgeoisie pour obtenir toutes les réformes utiles aux travailleurs. Second point : les ouvriers doivent partout s’associer en corps de métiers qui formeront des fédérations nationales, lesquelles s’uniront entre elles pour constituer une ligue universelle par métier. Celle-ci aurait pour mission de donner régulièrement des renseignemens sur la situation du travail et d’en défendre les intérêts dans les divers pays. On le voit, c’est l’idée mère de l’Internationale qui reparaît, mais spécialisée et appliquée dans chaque métier. Ce congrès fut le dernier organisé par les marxistes. Leur chef, l’auteur du livre fameux Das Kapital, semble s’être depuis lors retiré complètement de la vie active pour préparer dans sa retraite, à Londres, le second volume de son ouvrage annoncé depuis longtemps.

Les autonomistes convoquèrent une assemblée générale à Bruxelles le 7 novembre 1874. Dans le compte-rendu officiel nous voyons qu’elle n’eut plus rien d’international que le nom. Il n’y figure qu’une vingtaine de délégués, tous Belges, sauf Gomez pour