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forment, avec celle de Rio les principaux centres de production du café. Le chemin promettait donc d’être lucratif, et la concession dont il fut l’objet forma le type sur lequel on copia toutes celles qui furent accordées par la suite.

Le maximum de la dépense de premier établissement était fixé par décret ; l’état garantissait l’intérêt en or au taux de 7 pour 100 de la somme représentant cette dépense ; il se réservait le partage des bénéfices, jusqu’à complet remboursement de ses avances, dès que l’entreprise rapporterait 8 pour 100 de dividende aux actionnaires.

Les mécomptes ne tardèrent pas à se produire. La ligne devait traverser une chaîne de montagnes, appelée Sema do Mar, qui longe le rivage du. Brésil presque dans toute son étendue. Cette trouée nécessita des travaux ruineux. La compagnie anglaise construisit seize, tunnels, de nombreux ouvrages d’art, puis fut forcée de s’arrêter faute d’argent. Le parcours de la côte et la traversée des hauteurs avaient absorbé tout le capital garanti. Elle avait dépensé 800,000 francs par kilomètre pour en construire un peu plus de 100.

Pendant qu’elle subissait ces épreuves, à l’autre extrémité du San-Francisco, le complément du projet de communication intérieure, arrivé à la période de fixation du tracé, prenait les proportions d’une question politique. Les deux riches provinces de Bahia et de Pernambuco se faisaient la guerre chacune pour obtenir sur son territoire la ligne qui devait joindre à la mer le fleuve au-dessus de son embouchure et des chutes de Paulo Affonso. Pour trancher la difficulté, le gouvernement accorda deux concessions, l’une d’un premier chemin de 125 kilomètres aboutissant à Pernambuco, l’autre d’un second aboutissant à la ville de Bahia, sur une longueur de 124 kilomètres. Des intrigues de tous genres compliquèrent les opérations des compagnies anglaises concessionnaires. Des plans peu judicieux, plus profitables aux intérêts particuliers qu’à l’intérêt général, leur furent, paraît-il, souvent imposés ; des sommes considérables durent être détournées de leurs véritables destinations pour concilier des influences utiles ; en fin décompte, l’état ayant accordé aux compagnies les avantages déjà concédés à celle du Pedro II, se vit bientôt obligé de payer des garanties d’intérêt considérables. L’année dernière, après vingt-six ans écoulés depuis les actes engageant ces garanties, on calculait à Rio que la ligne de Pernambuco avait coûté, en intérêts payés, au trésor brésilien et au trésor de la province[1]

  1. Relatorio do ministro da agricultura 1879, pages 189 et 205. Les provinces devaient payer une part de la garantie d’intérêt (2 pour 100).