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remontait au temps de l’invasion des Turcs en Afrique. Quand ils y étaient arrivés, ils avaient trouvé sur le littoral des établissemens français où les Arabes venaient vendre leurs produits, au maintien desquels les conquérans avaient consenti moyennant une redevance annuelle qui s’élevait en 1790 à 90,000 francs. Les désastres de notre marine sous la révolution et au commencement de l’empire, avaient fait passer en 1807 ces établissemens aux mains des Anglais, Ils les gardèrent pendant dix ans, c’est-à-dire jusqu’au jour où le dey Omar, irrité contre la Grande-Bretagne par le bombardement qu’avait commandé lord Exmouth, reprit les concessions, les offrit à la France moyennant un tribut de 300,000 francs que son successeur mieux disposé pour elle ramena bientôt au chiffre de 1790, c’est-à-dire à 90,000 francs, sur la preuve qui lui fut fournie que nos établissemens avaient grand’peine à se relever de l’état déplorable auquel les avait réduits la possession britannique. Mais cet état de choses ne devait pas être de longue durée ; l’avènement du dey Hussein, qui succéda en 1818 à Ali-Khodja, mort de la peste, remit tout en question.

A peine sur le trône, Hussein-Dey manifesta le dessein d’augmenter la somme des redevances payées par la France. Des négociations s’engagèrent à cet effet entre lui et le consul de France, M. Deval. Comme ses devanciers, Hussein-Dey était un aventurier énergique et habile à qui son audace avait donné le pouvoir. Enfermé dans son palais, la Casbah, entre ses femmes et ses familiers, il contenait d’une main ferme ses voisins les beys d’Oran, de Constantine et de Titteri, ses janissaires toujours prêts à la révolte, bien que son élévation fût leur œuvre, et les tribus arabes qui cherchaient à secouer le joug des Turcs. Se croyant invincible dans sa capitale savamment fortifiée à la suite du bombardement de 1816, il entendait continuer la politique d’exigences et de bravades qui avait réussi à ses prédécesseurs. Il apporta ces sentimens dans les négociations entamées avec M. Deval ; plus d’une fois, elles dégénérèrent en querelles âpres et violentes dont les historiens de la conquête nous ont conservé le récit. Enfin, après une durée de plus de deux ans, elles se dénouèrent, en 1820, par une convention qui régla le taux des redevances à 220,000 francs. Mais cette affaire n’était pas la seule qui créât des difficultés entre la France et Alger. Le dey réclamait encore au gouvernement du roi le montant de fournitures faites en 1798 à l’armée d’Égypte par deux juifs algériens auxquels ses prédécesseurs s’étaient peu à peu substitués. Cette créance tour à tour exagérée et contestée, avait donné lieu à de longs pourparlers. En 1820, les chambres françaises l’avaient inscrite au budget pour une somme de 7 millions, en stipulant toutefois, conformément à l’acte transactionnel qui en avait fixé le