M. Marsden pour les égards dont il a été l’objet pendant la traversée ; en témoignage de bon souvenir, il distribue de jolies nattes. Tout le monde descend à terre ; en secret, les deux grands chefs, Tuatara et Korokoro, se sont concertés pour offrir un beau spectacle aux missionnaires anglais, le plus beau des spectacles aux yeux des Néo-Zélandais : un simulacre de combat. Peu d’instans et les évolutions commencent ; disposés en lignes de bataille, les guerriers marchent à la rencontre les uns des autres ; comme une immense clameur, retentissent dans l’air d’épouvantables vociférations. Alors les attaques furieuses, les retraites précipitées se succèdent avec l’ordre et la régularité convenables quand il s’agit de ne faire de mal à personne. Dans les groupes on distingue quelques femmes qui semblent lutter avec une vaillance extraordinaire ; la reine de Tepuna, la femme de Tuatara, vêtue de la robe rouge qu’elle tient de la générosité de M. Marsden, témoigne, en agitant son bras armé d’un énorme pistolet d’arçon, d’une intrépidité sans égale.
Le lendemain, c’était la fête de Noël. Sur un emplacement choisi, où par les soins de Tuatara, tout avait été disposé pour une grave cérémonie, le révérend Marsden célébrait l’office divin en présence des Anglais, des troupes de Korokoro, de la population entière de Rangihou. Inspiré sans doute par la grandiose simplicité du théâtre où il élevait la voix, le chapelain sut trouver des accens pour émouvoir ses compatriotes, pour toucher les indigènes.
Il en avait peu coûté aux ministres évangéliques de faire choix du terrain propice pour s’installer, mais les matériaux de construction manquant dans la localité, on dut mettre à la voile, afin de se rendre sur la côte méridionale de la baie à l’embouchure de la rivière Cowa. En débarquant, les Anglais rencontrent un vieux chef du nom de Tarra, assis, à la façon d’un patriarche antique, au milieu des gens de sa tribu. Le Néo-Zélandais montre avec orgueil un champ de blé dont l’origine est due à des semences distribuées par les missionnaires à l’époque de leur première visite. Il fallait, en remontant la Cowa, se porter à plusieurs milles de distance pour atteindre le district où une vaste forêt permettrait d’obtenir le bois nécessaire à l’établissement de Rangihou. Pendant la route, on eut bien des fois l’occasion de s’émerveiller de la beauté du pays ; la rivière offrant de nombreuses sinuosités, à chaque détour s’ouvrent des perspectives toujours nouvelles et pleines de charme. On mit pied à terre en un endroit désigné pour se rendre au village du chef principal de la région ; il restait à gravir une colline, on trouva des guides empressés. Bientôt les Anglais se virent en présence d’un homme de proportions athlétiques ; c’était le chef. Comme déjà, autour de lui, on avait beaucoup parlé des missionnaires en quête de bois pour bâtir, il n’eut aucune surprise