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Tantôt à la rame, le plus fréquemment, je pense, à la voile, la flotte d’Agathocle poursuivait son chemin. Quelle route a-t-elle prise ? Diodore de Sicile l’ignorait sans doute, car il ne nous apprend rien sur ce point. Je sais fort bien, pour moi, celle que j’aurais choisie : j’aurais longé toute la côte de Sicile jusqu’à Sélinonte, et de là j’aurais coupé au plus court sur Porto-Farine. Est-ce là l’itinéraire adopté par Agathocle ? 3’inclinerais vraiment à le croire, quand je lis dans Diodore de Sicile la description des lieux où la flotte de Syracuse aboutit. Cette flotte était en mer depuis six jours et six nuits, les Carthaginois avaient perdu sa trace ; le septième jour, au matin, le hasard mit de nouveau les deux escadres ennemies en présence. La chasse reprend plus vive et plus acharnée que jamais.

« Je ne trouve que quatre manières de voguer, écrivait à la fin du XVIIe siècle un de nos capitaines de galères. La première, c’est de faire toucher le genou de la rame sur le banc où l’on monte en y mettant le pied. Telle est la vogue qu’on emploie lorsqu’on sort d’un port ou lorsqu’on y entre. J’ai vu autrefois voguer sur la réale continuellement à toucher banc, surtout lorsque le général y était. Cette vogue est bien la plus belle, mais aussi elle est la plus fatigante pour la chiourme. La seconde vogue, dite la vogue à passer le banc, est celle dont on fait usage lorsqu’on est en route. On monte sur le banc sans le faire toucher par le genou de la rame. La troisième vogue se nomme la passe-vogue, en d’autres termes la vogue à coups pressés. Je la considère comme la pire de toutes. Je ne voudrais jamais m’en servir ; elle fatigue trop la chiourme et ne fait pas pour cela mieux avancer la galère. La passe-vogue n’est bonne que pour une petite course, pour une course d’une lieue au plus. La quatrième et dernière vogue consiste à faire donner une vogue bien large et à ne pas passer le banc. Cette vogue peut servir lorsque vous voulez ménager votre chiourme et ne la pas fatiguer. Je la juge inutile, car en ce cas il vaut encore mieux faire voguer par quartier. Pour bien voguer, il faut que la chiourme de la bande droite, — nous dirions aujourd’hui du côté de tribord, — monte de la jambe droite sur le banc et soit ferrée de la jambe gauche. La chiourme de la bande senestre, — du côté de bâbord, — mettra le pied gauche sur le banc et sera ferrée de la jambe droite. »

Un seul mot nous suffit, je pense, pour écarter toute ambiguïté de ce texte. Le banc sur lequel les rameurs mettent le pied est le banc de nage qui se trouve immédiatement devant eux. L’enjambée était grande à bord des quinquérèmes ; on facilita le mouvement en plaçant sous le banc un barrot qui reçut, de l’usage auquel on