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FAUST.

— Il faut que tu me le dises. Tu y es obligé.

MÉPHISTOPHÉLÈS.

— Je n’ose pas !

FAUST.

— En vertu de notre contrat, tu es forcé de parler !

MÉPHISTOPHÉLÈS (Avec angoisse).

— Je ne peux pas !

FAUST.

— Alors je t’exorcise !


Méphistophélès s’enfuit en poussant un cri, Faust se jette à genoux et prie. Il va être sauvé quand le démon, sentant sa victime lui échapper, s’avise de lui envoyer Hélène, ou la beauté idéale. Dans les idées de l’auteur du drame populaire, la tentation était irrésistible, et en même temps il y avait crime à y succomber. — « Viens ! s’écrie Faust éperdu, en apercevant Hélène. Tu seras mon tout ! Tu seras ma compagne pour toujours ! » — Il veut la saisir dans ses bras. Hélène se change en une furie qui lui reproche ses péchés, et Méphistophélès triomphant lui annonce qu’il est irrévocablement damné ; la nuit prochaine, au coup de minuit, les diables viendront chercher son âme. Les scènes qui suivent sont d’une grande puissance dramatique. Le malheureux Faust, torturé, dévoré de remords, erre à travers l’obscurité dans les rues désertes. En quelque lieu qu’il fuie, il entend, comme la Marguerite de Gœthe à l’église, une voix mystérieuse. Cette voix lui arrive du tribunal de Dieu, où son procès s’instruit en ce même moment.


LA VOIX.

Fauste ! præpara te !

FAUST.

— Maintenant, Faust, prépare-toi aux tourmens éternels ! Le prince de l’enfer t’appelle ; il t’attend ; tu vas recevoir la juste punition de tes péchés. (Il fuit.)

LA VOIX. (Dix heures sonnent.)

Fauste ! accusatus es !

FAUST.

— Maintenant, Faust, on t’accuse à cause de tes péchés. Malheureux ! Où trouverai-je des consolations, où trouverai-je du secours ? Dans mon angoisse, le vaste monde me paraît trop étroit. L’aiguillon qui pique ma conscience est au dedans de moi ; il n’y a plus de salut, plus de