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MEMOIRE
DE
MADAME DE REMUSAT
(1802-1808

CHAPITRE VIII[1].
(1804.)

Procès du général Moreau. — Condamnation de MM. de Poligoac, de Rivière, etc. — Grâce de M. de Poligoac. — Lettre de Louis XVIII.


La création de l’empire avait distrait les esprits de la procédure du général Moreau, que l’on continuait d’instruire cependant. Les accusés avaient comparu plusieurs fois devant le tribunal; mais plus on avançait, plus on perdait l’espoir de la condamnation de Moreau, qui chaque jour devenait plus nécessaire. J’ai l’intime conviction que l’empereur n’eût point laissé couler son sang. Moreau condamné et pardonné lui eût suffi, mais il avait besoin de répondre par un jugement positif à ceux qui l’accusaient d’avoir mis de la précipitation et de l’animosité personnelle dans cette affaire.

Tous ceux qui ont apporté quelque froideur dans l’examen de cet événement se sont accordés à trouver que Moreau avait montré de la faiblesse et une assez grande médiocrité d’esprit sur le banc des accusés; il n’eut ni l’importance, ni la grandeur à laquelle on s’at- tendait. Il ne parut point, comme Georges Cadoudal, un homme déterminé qui convenait fièrement des hauts projets qui l’avaient animé, ni comme un innocent indigné d’une accusation qu’il n’a point

  1. Le premier volume des Mémoires de Mme de Rémusat, dont nous avons publié quelques fragmens dans la Revue du 15 juin, du 1er et du 15 juillet, va paraître à la librairie Calmann Lévy. M. Paul de Rémusat veut bien nous communiquer encore plusieurs chapitres des volumes qui doivent suivre.