Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/308

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la fronde. L’opposition qu’elle avait faite au pouvoir cessa devant les manifestations impérieuses de la volonté royale. Le jeune monarque entendait que rien ne vînt contrarier la réalisation des grands projets qu’il avait conçus ; il ne connaissait d’autre moyen d’assurer l’ordre dans l’état que d’y faire régner son bon plaisir. Il voulait que le clergé fût respecté, et il donnait sur ce point l’exemple, mais il n’admettait pas que ce corps eût le droit de lui refuser, dans le gouvernement des choses temporelles, l’obéissance qu’il exigeait de tous ses sujets, de contrevenir à une autorité qui, dans sa conviction, procédait de Dieu au même titre que celle du sacerdoce.

La lettre de Louis XIV à l’assemblée, au sujet du mémoire des agens généraux sur l’affaire du cardinal de Retz, avait suffisamment montré qu’il ne souffrirait pas que son autorité fut tenue en échec par les franchises et privilèges de l’épiscopat. Tout ce que cette assemblée de 1(355-1657 put obtenir, ce fut la promesse d’une déclaration portant que le roi ne voulait pas que l’on pût faire le procès aux évêques autrement que les saints décrets et l’usage du royaume l’avaient établi. Cette interminable question de l’administration du diocèse de Paris finit ainsi par s’arranger. Le clergé sacrifia un prélat qui n’avait fait que le compromettre et pour lequel il ne témoignait plus grande sympathie. Abandonné par ses ouailles qu’il avait plus agitées que conduites, Retz fut contraint, pour faire cesser son exil et échapper au dénûment auquel l’eût condamné le séquestre mis sur ses biens, de se démettre de son archevêché. Le roi consentit à arrêter les poursuites contre les ecclésiastiques qui s’étaient mêlés aux menées du cardinal. Il n’y eut d’exception que pour l’abbé Ghassebras, l’infatig.ible émissaire de l’ambitieux prélat, dont la résistance avait fait tant de bruit. Tout rentra dans l’ordre, mais cet ordre sentait un peu la servitude. Les assemblées allaient descendre pour un temps au rôle plus modeste de compagnie chargée de diriger et de contrôler l’administiation du temporel de l’église. Le calme qui reprenait possession des esprits après la longue agitation révolutionnaire de la fronde revint dans ces diètes de l’église de France auxquelles le monarque assura le respect et l’importance extérieure, mais autour desquelles il eut soin de faire un silence qui en diminua le prestige ; il entendait qu’elles ne sortissent pas de leurs attributions et que le public ne se mêlât pas de leurs affaires pour peser sur les décisions ou pour passionner les débats.

Alfred Maury.