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au pouvoir, ils s’étaient empressés de réunir de nouveau la commission internationale d’enquête, et de l’inviter à continuer ses travaux. Cette commission qui, pendant six mois, avait étudié dans tous ses détails l’organisation financière du pays, qui avait fait comparaître devant elle tous les fonctionnaires égyptiens, qui avait envoyé des délégués dans les provinces pour consulter sur place tous les registres de comptabilité, était d’ailleurs formée, on le sait, d’hommes rompus aux affaires de l’Egypte. Présidée par M. de Lesseps, ayant pour vice-présidens MM. Wilson et Riaz-Pacha, elle était composée de tous les membres de la caisse de la dette publique, lesquels habitaient le Caire depuis trois ans au moins et n’avaient cessé durant tout leur séjour de travailler à débrouiller le chaos financier dans lequel M. Cave et MM. Joubert et Goschen n’avaient pu faire pénétrer que des lueurs bien incertaines. Comme commissaires de la dette publique, les commissaires d’enquête n’avaient cessé de déclarer que les intérêts des créanciers et ceux des contribuables étaient solidaires; que ruiner l’Egypte était un détestable moyen d’assurer, sinon pour le présent, au moins pour l’avenir, le paiement des emprunts. « Nous avons considéré les intérêts des créanciers, disaient-ils dans leur compte rendu de 1878, comme étant jusqu’à un certain point, les mêmes que ceux des contribuables ; car, si on demandait aux contribuables des taxes qu’ils ne pourraient acquitter qu’en aliénant leur capital, on diminuerait la valeur du gage des créanciers... si donc il nous était prouvé que le pays ne peut pas supporter les taxes actuelles, que le gouvernement est disposé à prendre des mesures équitables et définitives pour le règlement de toutes les dettes non consolidées, que le gouvernement et son altesse le khédive sont tout prêts à faire toutes les économies possibles avant de demander aux créanciers de nouveaux sacrifices; si, d’autre part, il était donné de sûres garanties que les nouveaux engagemens seront mieux respectés que les précédens, qu’un effort sérieux sera fait pour réformer les abus, pour fixer plus équitablement l’assiette des impôts directs et notamment de l’impôt foncier, et pour mettre fin aux rigueurs de la perception, alors nous n’hésiterions pas à recommander tant aux négociateurs du décret du 18 novembre qu’aux créanciers eux-mêmes d’accepter un taux d’intérêt moins élevé. » Ces sages déclarations avaient précédé la première réunion de la commission d’enquête ; elles devaient servir de programme à tous ses travaux. Malheureusement, lorsque la commission s’était séparée, elle n’avait pas eu le temps de remplir jusqu’au bout sa tâche; elle s’était bornée à décrire l’anarchie financière qui avait permis à la dette publique d’atteindre d’effrayantes proportions ; mais elle avait été obligée d’avouer que cette