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Son langage paraît traduire des souvenirs personnels, qui pourraient donc se rapporter d’une part à cet ancien état de Rome dont Tacite a parlé, et d’autre part à l’une de ces périodes transitoires de trouble intérieur et d’anarchie telles qu’a été la triste année 69, celle de Galba, Othon et Vitellius.

Il n’est pas étonnant qu’après de tels désordres Vespasien ait voulu reprendre ou peut-être achever les travaux commencés par Néron. Son année de censure (73 après J.-C.) y fut employée. Il fit mesurer à nouveau et l’ancienne enceinte, toujours limitée aux murs de Servius Tullius, — c’était celle de l’urbs augurata, sacra, — et celle que formait, bien au delà, l’extrême limite, soit des quatorze régions d’Auguste, soit de ce que Pline appelle les exspatiantia tecta, l’urbs cum continentibus œdificiis, c’est-à-dire la ville légale. Il consacra de plus, en terminant cette censure, le temple de la Paix, et exposa sans doute sur le forum de ce nom un plan de Rome offrant les dessins géométriques de la forma nouvelle, très différente de celle d’Agrippa et d’Auguste. Il y a lieu de croire que c’est ce même plan que Septime Sévère et Caracalla auront restitué au même lieu avec quelque agrandissement, entre les années 203 et 211, après l’incendie du temps de Commode, et qu’il s’agit du célèbre plan Capitolin. On sait qu’on en a retrouvé des fragmens, au milieu du XVIe siècle, au pied du mur extérieur d’un édifice qui, après avoir servi d’archivé au préfet urbain, est devenu au VIe siècle un temple de la ville de Rome, et a été incorporé en 530 à l’église même des saints Cosme et Damien, formée de trois temples antiques. Gravé sur des plaques de marbre probablement fixées à ce mur par des attaches en fer, ce plan figurait non pas une partie de la ville, comme on l’a cru longtemps, mais Rome entière, avec les monumens publics et privés, avec les quartiers et les rues, avec les quatorze régions et le périmètre des œdificia continentia, sans oublier les villas et jardins intérieurs. Le regretté duc de Luynes, pendant le dernier voyage qu’il fit à Rome, voulait pratiquer de nouvelles fouilles en ce même lieu, pour essayer d’ajouter de nouveaux fragmens à ceux que l’on connaît, soit par les originaux conservés dans l’escalier du musée du Capitole, soit par les dessins des fragmens farnésiens perdus aujourd’hui, dessins donnés par Fulvio Orsini à la Vaticane et reproduits par Bellori. — C’est avec le même espoir que l’administration romaine poursuit en ce moment les fouilles du forum.

Quelque incomplets et mutilés qu’ils soient, les débris du plan Capitolin nous donnent une grande idée de la nombreuse population de Rome, de l’abondance et de la grandeur de ses édifices. C’est la seule représentation qui nous reste de la ville impériale