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ses dieux que les trinités plus ou moins vagues attribuées au druidisme.

L’étude de la géographie gauloise ne date pas d’hier. Sans parler d’anciens Theatra Orbis ou Thesauri geographici remontant à la fin du XVIe siècle, il faut citer l’ouvrage remarquable d’Adrien de Valois[1], qui parut en 1675, et qui resta longtemps supérieur à tous les travaux du même genre. La Notice de D’Anville, qui date de 1760, ne le vaut pas comme érudition ; mais c’est à cet habile géographe que l’on doit l’art moderne de dresser les cartes. Viennent ensuite beaucoup de mémoires, d’essais, de monographies se rapportant à une région, à des localités déterminées, mais dont la liste serait trop longue. Notre siècle les a vus foisonner en France et hors de France. On sait qu’une commission spéciale, instituée par le gouvernement déchu, s’occupe de reconstituer la carte des Gaules ; mais ses travaux, jusqu’à présent, n’ont rien donné de définitif. Toutes ces recherches ont été compulsées, mises à profit par M. Desjardins, et, sans lui attribuer l’honneur qu’il serait le premier à récuser de n’avoir laissé rien à faire à ses successeurs, on peut classer son ouvrage dans la catégorie de ceux qui ferment une période d’études en résumant les travaux antérieurs et en ouvrent une nouvelle en les dépassant. Nous classerons, comme l’auteur lui-même, les résultats les plus saillans ou les plus curieux de ce savant inventaire sous la triple définition de géographie physique, ethnique et politique.


I

La Gaule, la vraie Gaule historique, c’est-à-dire la Transalpine, — car la Cisalpine ou Gaule italienne ne fut gauloise qu’à demi, à la suite d’invasions relativement récentes, et ne tarda pas à s’italianiser, — la Gaule, mère de la France, est de délimitation si facile qu’on ne s’y est jamais trompé. C’est le pays renfermé entre le Rhin, les Alpes, les Pyrénées et la mer. Cela posé, le premier phénomène physique et le moins variable en tout pays de quelque étendue, ce sont ses grandes arêtes, ce qu’on pourrait appeler son squelette, ce sont ses montagnes.

Les Alpes, du haut de leurs sommets vénérables, ont vu défiler bien des essaims de nos aïeux inconnus en quête d’un pays où il fît bon s’établir. Strabon remarquait déjà que leurs contreforts divergeaient en Gaule et convergeaient en Italie, ce qui rendait les incursions et les invasions plus faciles de Gaule en Italie que d’Italie en Gaule. Les hautes montagnes n’ont pas d’histoire, mais les hommes qu’elles effraient et attirent tour à tour sont loin de nourrir pour

  1. Notitia Galliarum.