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FREJUS

LE PORT ROMAIN ET LA LAGUNE DE L'ARGENS

Le chancelier Michel de L’Hospital, dont la vie calme et austère a été un modèle de vertu et d’intégrité en même temps qu’une protestation courageuse contre les violences fanatiques qui ont ensanglanté le XVIe siècle, était aussi un érudit et surtout un lettré. Il cultivait le grec ; il connaissait le latin aussi bien, peut-être mieux que le français, le parlait et l’écrivait avec une si grande facilité qu’il l’employait souvent dans sa correspondance familière. Tout comme un riche oisif qui aurait habité quinze siècles plus tôt une villa de la Campanie ou les bords alors si fréquentés du Tibre, il nous a laissé de nombreuses épitres en vers ; et, sans aller jusqu’à soutenir avec ses admirateurs qu’elles ont une facture égale à celle d’Horace, il est certain que le style net, sobre et correct du grand chancelier ne serait pas désavoué par un écrivain du siècle d’Auguste, et que l’œuvre poétique de L’Hospital peut être comparée, au point de vue littéraire, à celles de certains auteurs classiques de la belle époque. L’une de ces épîtres, adressée à son ami Jacques du Faur de Pibrac, est le récit d’un voyage dans le midi de la France et constitue une sorte de poème descriptif et géographique où tous les lieux sont dépeints avec une fidélité parfaite.

Après avoir parcouru la chaîne boisée des Maures et avant de s’engager dans les gorges alors si redoutables de l’Estérel, le chancelier s’arrêta quelques instans à Fréjus et voulut visiter les ruines de cette ancienne ville impériale dont le port avait été, aux