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inévitable. Maintenant c’est donc un autre règne qui s’ouvre en Égypte, et tout ce qu’on peut dire du nouveau khédive, Tevfik-Pacha, c’est qu’après avoir été placé par son père à la tête du cabinet où se trouvaient des ministres européens, il a paru porter aux affaires un esprit éclairé et bien intentionné. C’est déjà quelque chose sans doute. On ne peut se dissimuler toutefois que si la crise égyptienne est jusqu’à un certain point dénouée par l’abdication ou la déposition d’Ismaïl-Pacha, elle reste ouverte sous d’autres rapports. Elle n’est peut-être que transformée, elle n’est pas absolument finie, elle entre dans une phase nouvelle. Il n’est point impossible que le sultan, après avoir exercé avec quelque solennité son pouvoir suzerain sur l’Égypte, essaie de profiter de la circonstance pour l’exercer maintenant d’une manière plus active et plus directe. Une circulaire récente du divan laisserait soupçonner à Constantinople des illusions ou des prétentions qui pourraient créer plus d’une difficulté, si elles n’étaient pas simplement l’ostentation d’un pouvoir en déclin. D’un autre côté, il n’est point douteux que la France et l’Angleterre, en provoquant le changement qui vient de s’accomplir, ont pris une assez grave responsabilité. Elles se sont engagées envers le sultan, dont elles ont mis le pouvoir en mouvement, envers le nouveau règne égyptien qui s’ouvre presque sous leurs auspices, envers l’Europe et envers elles-mêmes.

Elles ont contracté en quelque sorte l’obligation de faire mieux que ce qui a été fait jusqu’ici, de veiller à une organisation administrative et financière du pays, de donner satisfaction aux intérêts étrangers, et par cela même elles vont être nécessairement conduites à se mêler plus activement, plus intimement des affaires de l’Égypte. C’est une situation qui n’est ni sans danger ni sans inconvénient, puisqu’elle implique une mesure d’intervention ou de coopération assez décisive pour obtenir quelque résultat et assez prudente pour que le nouveau khédive n’ait pas l’air d’être à Alexandrie un ministre des volontés étrangères. On a obtenu une première déposition, il ne faudrait pas échouer dans l’expérience qui va commencer. La première condition d’une action efficace et utile, dans tous les cas, c’est que la France et l’Angleterre né cessent pas d’être d’accord, et si les affaires égyptiennes devaient conduire à une sorte d’entente permanente, à des habitudes d’intimité entre l’Angleterre et la France, ce serait assurément un avantage dont les effets ne tarderaient pas peut-être à se faire sentir dans la politique tout entière.

Le parlement italien n’arrive pas sans peine au terme de sa session. Il n’en a pas fini avec les conflits qui partagent en deux camps opposés le sénat et la chambre des députés au sujet de cet impôt sur la mouture pont la suppression est imposée au gouvernement comme une nécessité politique et comme un grand embarras financier. Il n’est cas toujours