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on peut aimer les maîtres d’école, mais il y faut un peu de mesure.

Fallait-il aussi étendre à l’enseignement primaire et secondaire le principe électif ? N’est-il pas à craindre que l’esprit de discipline et de subordination hiérarchiques, déjà si affaibli dans l’Université, ne souffre de cette innovation ? Eh quoi ! vous refusez aux membres de l’enseignement libre le droit d’élire eux-mêmes leurs délégués, et vous accordez ce même droit à des gens que vous nommez, que vous révoquez et que vous payez, à des fonctionnaires. Vous permettez qu’ils s’assemblent et choisissent eux-mêmes leurs mandataires, et vous interdisez cette même chose aux chefs d’institutions. Vous l’autorisez là où elle peut avoir des inconvéniens, vous la défendez où elle n’aurait que des avantages. Voilà certes une étrange inconséquence et qui marque bien encore le fond de votre pensée.

Au surplus, ces anomalies n’ont rien qui doive nous étonner : la logique les commandait. Quand on entre dans la voie de l’ostracisme, il y faut aller jusqu’au bout. Une exclusion appelle une autre exclusion, une proscription en provoque une autre. Ainsi l’épuration du conseil supérieur impliquait celle des conseils académiques, et M. le ministre de l’instruction publique a très justement pensé que la réforme des uns devait coïncider avec la réorganisation de l’autre et qu’il était tenu d’appliquer les mêmes principes à toute notre législation. C’est le but du titre II de son projet.

Les anciens conseils académiques étaient composés du recteur président, des inspecteurs de la circonscription, des doyens de facultés et de sept membres choisis tous les trois ans par le ministre de l’instruction publique, savoir : un parmi les archevêques ou évêques de la circonscription ; deux parmi les membres du clergé catholique ou parmi les membres des cultes non catholiques reconnus ; deux dans la magistrature ; deux parmi les fonctionnaires publics ou autres personnes notables de la circonscription (loi du 14 juin 1854). Les conseils de M. Ferry ne seront composés, conformément à la règle générale établie par l’article 1er, que de membres appartenant à l’enseignement public. Plus de clergé catholique ou protestant ; plus de magistrature ; plus de notabilités ; rien que des inspecteurs, des doyens et des professeurs de facultés, des proviseurs ou principaux et des professeurs d’enseignement secondaire. Une seule exception en faveur des conseils généraux et municipaux : dans chaque conseil, il y aura quatre membres choisis par le ministre de l’instruction publique dans les assemblées départementales ou communales du ressort. A part cette dérogation qui constitue une flatterie pleine de délicatesse à l’endroit des puissances du jour, le conseil académique ne comptera, comme l’autre, que des pédagogues. Comme dans l’autre aussi, la représentation de renseignement libre y sera complètement illusoire. On ne l’exclut pas