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douze jours et ne rendit le château et la garnison qu’aux conditions les plus honorables. Marans fut réduit aussi un mois après la bataille sous l’obéissance du roi. Pontivy se retira à La Rochelle après la capitulation : il y trouva Jeanne d’Albret et Soubise (le baron Du Pont-Soubise, premier époux de Catherine de Parthenay, la fille de Jean de Parthenay-L’Archevêque, sieur de Soubise; le baron Du Pont avait assumé après son mariage le nom de Soubise). L’un des hommes de la suite de Soubise, nommé Verbuisson, essaya traîtreusement de livrer la ville aux royaux, mais ce projet fut déjoué. Les protestans réussirent à reprendre Marans : Puiaut, La Noue, Soubise et d’autres marchèrent toute la nuit, souvent ayant de l’eau jusqu’à la ceinture, et chassèrent la garnison catholique (mars 1570).

Après cette surprise, les protestans ne cessèrent de courir le Bas-Poitou jusqu’à ce qu’une grosse armée royale y fut envoyée; La Noue, les deux Rohan et Puiaut lui tinrent tête : on livra bataille à Saint-Gemme. Les Poitevins obtinrent la victoire : ils mirent le siège devant Fontenay-le-Comte ; mais La Noue eut le bras cassé d’une balle devant cette place. Il fut porté à La Rochelle, laissant Soubise chef de l’armée. Le départ de La Noue jeta le découragement parmi les protestans. Soubise réussit pourtant à faire capituler la place (le 28 juin).

C’est à ce moment que la reine de Navarre nomma le cadet des Rohan, Pontivy, chef de toutes les troupes de l’Angoumois, malgré sa grande jeunesse : elle avait été frappée de ses rares qualités. La reine voulait reprendre Saintes et toute la Saintonge, autrefois très affectionnées aux idées nouvelles ; « elle fit tant que les Angoumoisins promirent de suivre Pontivy, en tous les endroits esquels il les voudrait employer[1]. » Ainsi Pontivy, chef de l’armée, suivi des Poitevins, s’achemina sur Tonnay-Charente et alla mettre le siège devant Saintes. « Soubize fut envoyé au delà l’eau (où est la ville) avec trois cents chevaux, nombre d’arquebusiers montés et les deux régimens de fantassins de Blacons et Glandaie. Pontivy, avec huit cornettes et le régiment de Payet, voulut demeurer deçà la Charente au pont des Dames, afin d’empêcher le secours qui pourrait entrer aux assiégés, du côté de Saint-Jean ou de Niort. » Soubise conduisit l’assaut : « Soubize néanmoins, suivi de cinq, encore que peu auparavant il eût reçu une harquebuzade par la joue, estimant être mieux accompagné, monta jusques au haut de la brèche, où il donna quelques coups et en reçut d’autres, nommément d’une pique à travers les machoueres, qui le fit retirer avec les autres presque tous blessés et deux ou trois morts. » La ville se rendit le lendemain ;

  1. Le Frère de Laval, page 498.