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féconde en grands résultats : l’ancien droit, le droit de la monarchie de juillet et de la restauration aboli, la loi commune substituée au régime d’exception des écoles secondaires ecclésiastiques et des membres des congrégations non reconnues; la liberté d’enseignement soumise aux garanties strictement nécessaires; la société, par ses représentans les plus éminens, appelée à participer, de concert avec le gouvernement, à la direction de l’instruction publique et privée; enfin et surtout la réconciliation de l’église et de l’état scellée pour de longues années : au nom de l’état par M. Thiers ; au nom de l’église par M. de Montalembert. Il y avait là, ce semble, de quoi faire pardonner au législateur de 1850 quelques concessions fâcheuses. Peu de lois cependant ont été jugées avec plus d’injustice et de partialité. Accueillie dans le principe avec une faveur marquée par l’opinion libérale, elle a bientôt vu ces bonnes dispositions se tourner en aigreur. L’Université surtout s’est signalée par son ardeur à critiquer une œuvre qui n’est certes pas sans défaut, mais qui eut du moins le mérite d’inaugurer dans ce pays une ère de paix et de liberté. Au lieu d’en considérer les côtés élevés et généreux et de la placer pour la juger équitablement dans son milieu véritable, on s’est appliqué à en faire ressortir les parties faibles et défectueuses; on l’a dénoncée comme une entreprise réactionnaire et cléricale, et son véritable auteur, celui qui eût mérité bien plus que M. de Falloux d’attacher son nom à la loi de 1850, l’illustre M. Thiers lui-même, s’est vu représenté dans maint pamphlet sous les traits les plus noirs. N’a-t-on pas été jusqu’à lui jeter à la face, comme le dernier des outrages, l’épithète de jésuite!

Au surplus, à qui n’a-t-on pas adressé cette accusation banale? Et qui pourrait se flatter d’y échapper? Ç’a toujours été un travers de l’esprit français de croire à l’existence d’une vaste conspiration de la société de Jésus contre la société civile et contre ses lois. Aucun malheur, aucune leçon n’a pu nous guérir de cette manie, elle est incurable. Aux jours sombres, quand l’émeute est dans la rue, quand Paris brûle, un moment la peur de l’incendie, jointe à des sentimens d’un ordre plus élevé, l’emporte en nous sur la peur des « hommes noirs. » Nous commençons à nous douter qu’il pourrait bien y avoir un péril social aussi dangereux que l’autre, et nous cessons de déclamer contre la congrégation et le a parti prêtre. » Aussi bien il serait de mauvais goût d’accabler des gens dont la poitrine vient de servir de cible aux libres penseurs des barricades. Mais voici que l’ordre renaît : la rue est tranquille, le feu ne menace plus nos maisons, la Bourse remonte; bref nous respirons. Dès ce moment la rechute est imminente : elle ne se déclare pas immédiatement; elle attend, suivant les circonstances et les époques, un an, deux ans, quelquefois trois, jamais davantage. Passé