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à un titre quelconque. Il n’y a donc aucune assimilation à faire entre les 40 centimes de 1848 et le projet de conversion d’aujourd’hui.

Nous n’avons qu’un mot à dire du droit qu’a l’état de proposer le remboursement de sa dette et d’arriver ainsi à la conversion en un titre produisant moins d’intérêt. Ce droit est inscrit formellement dans l’article 1911 du code civil, qui est ainsi conçu : « La rente constituée en perpétuel est essentiellement rachetable. Les parties peuvent seulement convenir que le rachat ne sera pas fait avant un certain délai, qui ne pourra excéder dix ans, ou sans avoir averti le créancier au terme d’avance qu’elles auront déterminé. » Et du reste, ceux qui combattent la conversion ne contestent pas le droit de remboursement; ils voudraient seulement qu’il restât à l’état platonique et qu’on ne s’en servît jamais. La seule question à examiner dans une mesure de ce genre est celle de savoir si la mesure est bien justifiée par la nécessité. Cela ne nous paraît pas contestable. Au point de vue financier, elle permet d’abord de réaliser une économie plus ou moins considérable au profit du trésor ; et cette économie n’est pas à dédaigner dans les circonstances présentes. Nous avons un budget très lourd, on est obligé pour y faire face de maintenir des impôts qui sont une entrave pour la richesse publique et dont la disparition produirait certainement un excellent effet. On ne peut pas songer à les supprimer, ni même à les réduire, sous peine de mettre le budget en déficit. Avec l’économie provenant de la conversion, cette suppression ou réduction deviendrait possible.

Maintenant, au point de vue économique, nous sommes dans une situation tout à fait fausse, préjudiciable au crédit public, et dont il importe de sortir au plus tôt. Deux fonds sont à côté l’un de l’autre, émanant du même débiteur et capitalisés à des taux différens; l’un, le 5 pour 100, est à 115 francs, et l’autre, le 4 1/2, à 110, avec 5 francs de différence seulement, lorsqu’il y a un écart de 1/2 pour 100 dans le revenu, ce qui devrait représenter au moins 10 francs dans le capital. Cette anomalie tient à la menace de conversion qui pèse sur le 5 pour 100. Ce fonds ne peut pas s’élever. Il faut pourtant qu’une porte soit ouverte ou fermée ; si on veut la fermer, qu’on déclare hautement qu’on ne fera jamais la conversion du 5 pour 100, les contribuables y perdront tout le bénéfice qu’ils peuvent attendre de la diminution de la dette, et le budget ne sera pas allégé. Mais, je le répète, la situation sera nette, elle se régularisera dans un certain sens. Le crédit de l’état débarrassé de ses entraves s’élèvera au taux qu’il doit atteindre ; si au contraire la porte doit rester ouverte, il faut alors qu’on fasse la conversion le plus tôt possible, car il y a perte à rester dans une situation fausse