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savoir que l’enfant dont il n’a pu venir à bout sera placé pendant deux ou trois mois sous l’influence des sœurs. Notons cependant que depuis quelques mois il est fait un usage beaucoup moins fréquent de la correction paternelle, comme si l’action de l’autorité avait subi un relâchement à tous les degrés auxquels elle s’exerce. J’ai déjà, en parlant des différens refuges de Paris, signalé l’existence de cette communauté, plus connue sous le nom de Couvent de la Madeleine ; mais mes lecteurs éprouveront peut-être quelque curiosité d’en connaître les aménagemens intérieurs, d’autant plus que le nombre des hommes qui en ont franchi le seuil n’est pas très considérable. Ce n’est pas un des contrastes les moins saisissans de Paris que l’existence, en plein quartier latin, en plein royaume des étudians et des grisettes, de ce couvent rigoureusement cloîtré auquel ses hautes murailles extérieures, à peine percées de quelques jours de souffrance sur la rue Saint-Jacques et la rue Gay-Lussac, donnent l’aspect d’une prison. Avant d’y être admis, j’ai dû attendre quelques instans dans un petit parloir sur les murailles duquel sont inscrites des sentences sévères, assurément bonnes à méditer, même pour le visiteur, et parlementer à travers un double grillage en fer avec deux sœurs dont la robe blanche et le long voile noir rappellent le costume des augustines de l’Hôtel-Dieu. Mais je dois dire qu’une fois le but de ma visite exposé et des justifications bien naturelles fournies, j’ai trouvé, comme au reste dans toutes les maisons religieuses, un accueil exempt de petitesses, et des facilités sans réserve pour visiter dans tous ses détails une maison dont on a bien raison d’éloigner les curiosités frivoles. Celles qui viennent y chercher un refuge contre leurs propres faiblesses et contre les tentations du dehors ont en effet le droit d’y trouver également un abri contre des investigations indiscrètes.

La plus grande partie des bâtimens de l’ancien monastère des Visitandines, qui depuis le commencement du siècle sert d’asile à la pénitence, est affectée aux pensionnaires du refuge dont le nombre s’élève à près de trois cents. Les dispositions intérieures de ces vieux bâtimens, où l’on se perd dans un dédale d’escaliers, de dortoirs, de salles de travail, se prêtent à merveille à l’établissement et au maintien des catégories multiples qu’il est nécessaire d’établir dans une population incessamment renouvelée. Lorsqu’on a l’œil un peu fait à l’observation des misères morales, on pourrait presque, et malgré l’uniformité du costume, discerner au visage de ces détenues volontaires ; la catégorie à laquelle elles appartiennent. Dans la division des arrivantes, ce que les physionomies expriment le plus souvent, c’est tantôt une résolution sombre et un peu hagarde, tantôt une sorte d’affaissement et de stupeur. C’est la classe