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des gages des officiers, il ne restait que cela pour parfaire les deux millions.

Le suffrage de la province de Toulouse, dont l’archevêque métropolitain s’était fait l’organe, entraîna la majorité. Les 700,000 livres furent refusées. Ce résultat déconcerta d’autant plus les amis de Richelieu qu’ils s’y étaient moins attendus, car l’émissaire du cardinal avait montré un papier où étaient pointés les noms des membres sur lesquels il comptait et dont le nombre dépassait celui des opposans. La colère des battus se tourna contre l’archevêque de Toulouse. Ils s’étaient persuadé que le prélat finirait par céder. Aussi, dès qu’il eut émis son avis, fut-il apostrophé par les évêques de Chartres et d’Auxerre, Léonor d’Estampes et Pierre de Broc, âmes damnées de Richelieu ; ils lui reprochèrent tout haut de manquer à l’engagement pris par lui envers le premier ministre. Montchal répliqua sans s’émouvoir qu’il n’avait jamais promis de voter l’allocation des 700,000 livres ; alors les interpellations redoublèrent. Les deux prélats dévoués au cardinal n’épargnèrent pas davantage l’évêque de Vabres, qui avait voté comme Montchal ; ils l’accusèrent en termes plus offensans encore d’avoir forfait à l’honneur. Le prélat repoussa avec indignation ces injures, et la querelle se prolongea, au grand scandale de la majorité. Les choses en vinrent au point que Léonor d’Estampes et Pierre de Broc, s’approchant de l’évêque de Vabres, le menacèrent de lui faire un mauvais parti ; l’un des deux alla jusqu’à dire que, s’il était hors de l’assemblée, il l’étranglerait. On peut juger du tumulte que de telles paroles causèrent dans l’assistance. C’était de tous côtés un échange d’interpellations. Les évêques de Chartres et d’Auxerre s’en prenaient également aux députés du second ordre qui avaient opiné comme Montchal. Le président dut lever la séance au milieu d’un désordre difficile à peindre. Cependant l’assemblée reprit le lendemain ses travaux et, à l’ouverture de la séance, lecture fut donnée du procès-verbal où était relatée la décision prise la veille. Comme le président s’apprêtait à le signer, l’évêque de Nîmes se leva pour déclarer, au nom de la minorité, qu’il faisait opposition à la décision, demandant que sa protestation fût annexée au procès-verbal, faute de quoi lui et ses amis n’y apposeraient pas leurs signatures.

Le prélat invoquait une disposition du règlement d’après laquelle la minorité avait le droit lors du vote d’un impôt de faire insérer au procès-verbal l’opposition qu’elle y mettait ; le président soutint que l’article n’était pas applicable dans le cas présent, parce qu’il s’agissait du rejet et non de l’établissement d’un impôt. L’évêque de Nîmes répliqua que, si l’on ne faisait pas droit à sa demande, lui et tous ceux qui partageaient son sentiment quitteraient l’assemblée. Ce n’était pas, ajoutait-il, qu’il refusât d’une manière