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Paris sans s’être rien laissé arracher par ces cajoleries, et, comme je viens de le dire, évêques et députés du second ordre réunis à Mantes se trouvèrent peu en humeur d’accorder beaucoup au roi. Le mécontentement de la majorité se manifesta dès la première séance. L’archevêque de Sens, Octave de Bellegarde, l’ouvrit par un discours où il représenta à la compagnie les vexations exercées contre le corps ecclésiastique depuis deux années, vexations qui n’avaient même pas cessé après l’expédition des lettres de convocation de l’assemblée. On n’entendait en effet parler à Mantes que des exactions commises à l’égard des bénéficiers, dont les pétitions affluaient, et malgré les mainlevées annoncées, les poursuites et les saisies allaient leur train contre les officiers du clergé, qui réclamaient pour ce motif ou le remboursement de leurs charges ou des indemnités. Pour faire sentir le peu de confiance que devait inspirer le gouvernement, l’archevêque de Sens rappela le dessein que celui-ci avait eu d’abord de retarder la convocation régulière de la compagnie. Il s’étendit sur l’opportunité de la réunion d’une telle assemblée. Il s’éleva contre la promesse qu’avaient faite sans mandat les évêques de cour que le clergé accorderait les 6 millions de livres demandés par le roi. La plupart des députés présens désavouèrent comme Bellegarde l’engagement. On passa ensuite à la vérification des procurations, dont quelques-unes affectaient un caractère plus impératif que de coutume. L’assemblée s’étant définitivement constituée, on remit sur le bureau un billet de Richelieu qui, contrairement aux assurances qu’en avaient reçues les prélats lors de leur visite, insistait pour l’admission de l’évêque de Chartres en qualité d’évêque diocésain. Les termes du billet sentaient fort le commandement. On eut peur d’irriter le cardinal en refusant à Léonor d’Estampes ce à quoi les précédens lui donnaient droit, et l’on consentit à le laisser prendre part aux délibérations.

Une question plus grave que cette admission ne tarda pas à être agitée : c’était celle du choix des nouveaux agens généraux. J’ai déjà raconté, dans la première partie de ce travail, comment Richelieu prétendait imposer sa créature, l’abbé Berland, qui s’était mis en possession de vive force de ses fonctions et s’était saisi des papiers afin de livrer au cardinal le secret des ressources du clergé. Nonobstant ses efforts, le ministre de Louis XIII n’eut pas le dessus dans le débat. L’affaire vidée, venait celle qui primait en importance toutes les autres : la demande de fonds du roi. La situation faite à la compagnie était telle, comme je l’ai noté, que celle-ci semblait n’être appelée qu’à prononcer entre les deux modes offerts par Richelieu. La majorité inclinait visiblement pour l’imposition du tiers sur les revenus des bénéfices, dont le cardinal ne voulait point, mais qu’il avait au début de la session évité de repousser afin de ne pas