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Les faits cités dans cette étude ne donnent qu’une idée bien incomplète du nombre et de la variété des renseignemens contenus dans la Mythologie des plantes. Le docte auteur, en effet, ne s’est pas contenté de ceux qui nous ont été fournis par les Allemands, il en a, avec beaucoup de soin et de zèle, rassemblé de nouveaux en Italie, et il a interrogé dans d’autres pays les personnes qu’il savait être au courant du sujet. On ne saurait, à mon avis, le blâmer, quand il a été question de classer tous ces détails, d’avoir adopté l’ordre alphabétique, cet ordre facilitant singulièrement les recherches des savans auxquels l’ouvrage est particulièrement destiné.

Dans un livre de cette nature, l’exposition des faits n’est certainement pas la partie la plus difficile de la tâche de l’écrivain. Aussi l’auteur s’est-il constamment préoccupé d’en déterminer le sens. Les causes générales qui ont empêché jusqu’à présent la mythologie comparée de fournir à la science des résultats incontestés rendent assez malaisée, il faut l’avouer, l’interprétation des mythes du règne végétal. On est bien loin d’être d’accord sur les principes, et ceux qui acceptent les mêmes s’entendent difficilement dans les applications. Les Allemands sont assez disposés à voir partout des mythes solaires. En France, l’école de Dupuis et de Volney, qui a eu ses grands jours de popularité, avait aussi la passion des symboles astronomiques. En Angleterre, les idées des auteurs de l’Origine des cultes et des Ruines n’ont jamais eu la vogue qu’ont en Allemagne des théories qui ont un certain caractère de grandeur, d’unité et de poésie. M. Herbert Spencer, que ses compatriotes comparent à Aristote pour la profondeur et l’universalité des connaissances, traite avec un dédain mal dissimulé, dans sa Sociology, des opinions qui ont toujours d’éminens défenseurs dans les universités allemandes. Il veut qu’on cherche sur la terre et non dans les deux l’origine des croyances qui, sous les formes les plus diverses, se sont perpétuées jusqu’à nos jours. Quoique M. de Gubernatis n’ait aucune sympathie pour cette manière de voir, il ne se croit nullement obligé de prendre pour règle les exagérations de l’hypothèse contraire : « Je me sens si peu exclusif, dit-il, et je crois le monde mythologique si vaste que je n’ai pas besoin d’y vote seulement soit des mythes solaires, soit des mythes météorologiques, mais je pense que tous ces mythes y existent et d’autres encore. »

Il est difficile de ne pas donner à ce langage une complète approbation. Il semble, en effet, que l’éclectisme, dont la méthode a été avec raison critiquée quand il s’agit de philosophie, aurait ici sa revanche légitime. Si « tout ce qui se produit de merveilleux dans le monde est naturellement apte à enfanter des mythes, » combien de miracles étaient capables, sur notre globe, de