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LES ORIGINES
DU
ROMAN GREC

Erwin Rohde. Der Griechische Roman und seine Vorläufer, Leipzig, Breitkopf et Hürtel.

Quand Mme de La Fayette publia son roman de Zaïde, Segrais, sous le nom duquel le livre devait paraître, pria le savant Huet, qui fut plus tard évêque d’Avranches, de le faire précéder d’une préface de sa façon. — Remarquons, à ce propos, combien les temps sont changés. C’était alors l’érudition qui recommandait un ouvrage léger et lui donnait quelque crédit ; aujourd’hui un érudit, pour se faire lire, serait fort tenté de demander à quelque romancier à la mode de lui faire une préface et de le présenter au public. — Huet était d’ailleurs un homme du monde autant qu’un savant ; il fréquentait les bonnes sociétés et avait un grand goût pour les gens d’esprit. Il aimait beaucoup les romans, qu’il appelait « l’agréable amusement des honnêtes paresseux, » et quoiqu’il fût le moins paresseux des hommes, il se plaisait à les lire. A l’âge où Racine dévorait Théagène et Chariclée sous les grands arbres de Port-Royal, Huet avait traduit Daphnis et Chloé. Devenu plus tard un homme d’église et un personnage considéré, il ne se croyait pas obligé d’être sévère à ces vieux livres qui avaient enchante sa jeunesse. Il était plus indulgent encore pour les romans français de son temps, l’Astrée, le Grand Cyrus, la Cléopâtre, qui lui semblaient irréprochables. Il les trouvait, par la politesse et la galanterie, préférables à ceux des autres nations, et il donnait de