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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




28 février 1879.

Au moment où s’agitent encore à Versailles tant de questions pressantes dont la solution peut décider de la paix intérieure de la France et peut-être de l’avenir des institutions nouvelles, ce qu’il y aurait de mieux à faire pour les politiques du jour ce serait de lire, de méditer ces discours de M. Thiers recueillis par un sentiment de fidélité à une grande mémoire. Rien de plus lumineux, rien de plus attrayant que cette vive et familière éloquence, telle qu’elle apparaît dans la publication que le zèle éclairé de M. Calmon vient d’inaugurer.

Ces discours sont d’un autre temps, il est vrai, ils ne représentent encore que la première partie de la carrière parlementaire de M. Thiers ; ils ne dépassent pas pour le moment les derniers mois de 1836 : ils ne sont pas moins instructifs et moins saisissans. C’est le début d’un homme qui dès son entrée en scène se dévoile tout entier avec sa raison pénétrante, sa vivacité impétueuse, son esprit pratiqua et ses allures décidées, d’un homme qui, après avoir été un des premiers soldats de la parole sous la monarchie constitutionnelle, devait avoir au déclin de sa vie l’étrange fortune de contribuer plus que tout autre à accréditer, à rendre possible la république. Ce temps où apparaît M. Thiers est aussi un moment de luttes ardentes où une révolution accomplie de la veille cherche à se fixer, où un régime nouveau, né d’une grande commotion populaire, est occupé chaque jour à se disputer aux factions, à régulariser sa marche, à imposer aux partis déchaînés la paix intérieure et extérieure, par un système de modération. Le temps et l’homme revivent dans ces discours, qui semblent traiter des affaires d’autrefois et que tous les matins, avant de partir pour Versailles, députés ou ministres d’aujourd’hui pourraient certes relire avec fruit. Ils