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résistante. Ce résidu se décolore à la lumière, s’il est humide, mais non s’il est sec ; la putréfaction n’en altère pas la couleur. On obtient des résultats analogues avec d’autres dissolvans : l’acide gallique, une solution de chlorate de soude au vingtième, etc.

Bien que la pourpre visuelle ait pour siège unique la rétine, il ne faut pas croire qu’elle soit répandue dans toutes les couches de cette membrane ; loin de là. On ne l’a pas rencontrée chez tous les animaux ; et là où elle existe, elle ne se trouve pas toujours dans la même partie de la rétine : ce sont tantôt les cônes, tantôt les bâtonnets qui la renferment. Kühne ne l’a pas trouvée dans les cônes de la grenouille, du pigeon, de la chauve-souris, de l’orvet ; ceux du hibou au contraire en contenaient beaucoup. Les bâtonnets sont les dépositaires les plus habituels de la matière colorante.

Quand la rétine est une fois décolorée sur l’œil mort, il n’y a plus de régénération comme durant la vie : la pourpre visuelle ne se régénère que dans une rétine en contact avec une choroïde encore vivante.

L’action de la lumière sur la rétine est intéressante à plus d’un titre, car elle peut jeter un jour considérable sur la physiologie de la vision. Avant tout, il importe de rechercher quels sont les rayons du spectre qui exercent plus spécialement cette action. La lumière solaire décolore la rétine en quelques secondes ; celle du gaz n’amène ce résultat qu’au bout d’une demi-heure environ ; la flamme du sodium agit si peu que la pourpre visuelle résiste à son action pendant vingt-quatre ou quarante-huit heures. Si l’on opère avec les couleurs du spectre, en observe des effets très variés. Le rouge agit très faiblement : chez le hibou, il ne décolore la rétine qu’après soixante-douze heures d’exposition ; il en est de même du violet. Les couleurs qui agissent le plus sont le bleu et le jaune-vert. L’intensité des sources lumineuses employées est pour beaucoup dans les altérations produites : aussi bien y a-t-il à tenir compte de circonstances dont l’importance échappe quelquefois, mais qui peuvent modifier du tout au tout le résultat. Quoi qu’il en soit, Kühne croit pouvoir tirer de ses expériences les conclusions suivantes : toute lumière visible décompose le rouge rétinien, mais dans des temps variables, toutes choses égales d’ailleurs. Le temps dans lequel s’opère la décomposition est proportionnel à l’absorption de la lumière monochromatique. Les rayons dépourvus d’action chimique agissent peu, ou n’agissent pas du tout. En se décolorant, quelle que soit d’ailleurs la source lumineuse employée, la rétine passe par trois phases : d’abord pourpre, elle passe au jaune, de jaune elle devient blanche.

Mais le rouge rétinien, nous l’avons dit, se régénère continuellement ; on peut se demander quelle est la partie de la rétine chargée de reconstituer cette substance. Selon plusieurs observateurs, le rôle prépondérant dans la formation de la pourpre rétinienne doit être attribué aux