Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 31.djvu/781

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au parlement, auquel il exposa la situation. Le temps pressait. Quoique le jour fût déjà fort avancé, toutes les chambres s’assemblèrent, et, à la requête d’Augustin de Thou, portant la parole pour le procureur général, la cour rendit un arrêt par lequel elle ordonnait que les évêques-députés ne pussent sortir de Paris et comparussent à sa barre, et que ceux qui avaient déjà quitté la ville fussent arrêtés dans le lieu même où cet ordre leur serait signifié. La publication de l’arrêt mit fin à l’émeute. Les députés du clergé protestèrent contre l’outrage que leur faisait le parlement ; mais les choses en étaient venues à ce point qu’il eût été dangereux de persister dans le refus de subvention. Le roi était intervenu de nouveau et avait insisté pour que la somme nécessaire à assurer le paiement des rentiers fût votée pour un laps de dix ans. L’assemblée s’exécuta. De la sorte fut définitivement transportée sur le clergé la créance que l’Hôtel de Ville avait sur le roi. La couronne se débarrassa des rentiers, dont les réclamations incessantes, mais fondées, la gênaient fort. Elle rejetait sur le corps sacerdotal l’acquittement des arrérages, qu’elle s’était vue si souvent dans l’impossibilité de servir. Les rentiers y gagnèrent, car la richesse du clergé était pour eux une garantie plus sûre que le trésor royal, constamment obéré, et le crédit de l’état s’en trouva bien. Quoique le roi eût pris envers l’assemblée de Melun l’engagement de ne rien demander au-delà du terme convenu, tout esprit clairvoyant devait pressentir qu’une telle promesse ne serait pas tenue. Les concessions des deux assemblées convoquées depuis le colloque de Poissy avaient créé un précédent, auquel le clergé ne pouvait échapper. Il allait bientôt se voir dans l’obligation de concourir annuellement aux dépenses publiques et de fournir, comme les deux autres ordres, sa quote-part régulière d’impôts.

L’assemblée le comprit, et afin de veiller à ce que les demandes de subsides n’allassent pas en croissant, afin de sauver par son intervention régulière et périodique le droit du clergé de voter librement les décimes, elle sanctionna définitivement la résolution déjà prise à l’assemblée de 1567, avec l’approbation du roi, à savoir qu’une assemblée serait tenue tous les dix ans, pour y procéder au renouvellement du contrat de Poissy et en débattre les conditions, qu’il y aurait en outre de cinq en cinq ans une assemblée uniquement consacrée à l’audition des comptes des syndics généraux et receveurs du clergé, laquelle se confondrait naturellement à chaque période décennale avec la grande assemblée.

Ainsi fut constituée définitivement la représentation du clergé en France et réglé le roulement des sessions. Les assemblées décennales, dites grandes assemblées, votèrent les impôts, les