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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 janvier 1879.

Voilà donc la grande étape franchie ! Le 5 janvier est passé, et le scrutin sur lequel tous les regards se fixaient depuis quelque temps, qui était pour les uns un objet de vague appréhension, pour les autres un sujet d’espérance, ce scrutin a dit tout ce qu’il avait à dire.

Ces élections pour le premier renouvellement du sénat, elles se sont accomplies régulièrement, paisiblement, au milieu d’une liberté complète, sans aucune agitation inquiétante, sans la moindre apparence de pression abusive, et le résultat a certainement trompé ou dépassé toutes les prévisions. La veille encore, dans le sénat de la république, la majorité était à la droite ou aux droites, à cette coalition d’opinions dont le seul lien était l’antipathie contre la république ; depuis dix jours la majorité est passée aux groupes de la gauche, aux opinions ralliées à la république constitutionnelle, et cette nouvelle majorité n’est plus de quinze voix, de vingt-cinq voix, de trente voix, comme on le disait en essayant tous les calculs, elle arrive d’un seul coup après de soixante voix ! La victoire est complète, elle est en même temps singulièrement significative. S’il y a une chose évidente en effet, c’est que le pays, par son vote, par le caractère de ses choix, par la persistance de ses manifestations, a voulu mettre fin à une situation incohérente, précaire, sans garantie et sans sécurité. En écartant des candidats qui sont aujourd’hui les vaincus du scrutin, il a répudié une politique de fronde stérile, une coalition de partis qui, sans pouvoir rien faire par eux-mêmes, n’ont eu d’autre tactique jusqu’ici que de tout empêcher, de contrarier un régime imposé par la nécessité et la raison. En envoyant au sénat des républicains, d’ailleurs pour la plupart modérés, le pays a voulu tout simplement entrer dans un ordre régulier, dans la pratique sérieuse et sincère des institutions consacrées. Il a donné tout ce qu’on lui demandait, les moyens de faire vivre la république par « l’harmonie des pouvoirs » dans les limites de la légalité constitutionnelle. C’est là ce qu’on peut appeler la signification supérieure des élections sénatoriales, c’est