campons près de puits creusés dans le sable d’un torrent à sec ; deux jours encore nous suivons le lit du même torrent qui va se jeter dans la baie de Zeila et nous atteignons enfin Tococha, sains et saufs. Nous sommes en vue de Zeila, un navire à vapeur égyptien est au mouillage au loin devant la ville.
« Lundi 21. Ibrahim et Mohamet sont entrés hier à Zeila avec la caravane ; les marchandises et les bagages ont été empilés sur le port. Ibrahim, qui s’était tenu en arrière de nous pendant tout le voyage, a bien vite rejoint son frère dès qu’il a su que j’avais pris les devans. Mon personnel éthiopien est travaillé en sous-main par les agens d’Abou-Bakr. Quoiqu’il en soit, je me décide à venir à Zeila avec mes chevaux. Deux tentes avaient été dressées sur le bord de la mer, l’une pour moi, l’autre pour mes domestiques. Tout d’abord, je m’aperçois qu’une de mes malles m’a été volée ; c’est mon drogman Joseph Negousieh qui a fait le coup à l’instigation des musulmans. Les hostilités commençaient. »
Nous avons suivi pas à pas notre courageux compatriote, nous l’avons vu, à force d’énergie et de volonté, déjouer les obstacles et les dangers, mais tout cela n’était rien auprès des souffrances physiques et morales qui l’attendaient. Le 23 août, tandis que le bateau postal égyptien emmenait vers Aden le capitaine Martini et le Rév. Jacob, qui avait oublié de prendre congé, un autre bâtiment entrait au mouillage, et une salve de dix-sept coups de canon, partie de la côte, saluait le Somali Abou-Bakr, nommé pacha par le vice-roi reconnaissant. En effet, Abou-Bakr avait exécuté fidèlement les ordres reçus pour faire échouer la mission italienne ; c’est lui encore qui, informé par ses fils de l’arrivée du voyageur français, avait averti aussitôt les autorités khédiviales ; pendant son séjour au Caire, où il avait su se ménager par un cadeau princier de dix-huit belles esclaves gallas un favorable accueil, il s’était entendu avec le maître ; il avait reçu de nouvelles instructions, et il était impatient de les remplir.
Tout d’abord, un des fils du nouveau pacha, Mohamet, réclame 335 talaris pour frais de la caravane, auxquels il n’avait pas droit ; à son tour, Ibrahim demande 50 talaris qu’on lui devait encore moins ; survient alors le chef de la douane qui, après avoir pesé et enregistré les marchandises, exige 1,800 talaris, soit 11 pour 100 de leur valeur totale. M. Arnoux eut beau s’indigner, protester ; il lui fallut payer. Restaient les marchandises et les