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Ce qui précède résume les conditions théoriques de l’évaporation ; nous allons les retrouver dans les fonctions du monde atmosphérique. Quand la pluie tombe, c’est que la vapeur répandue dans l’air passe à l’état liquide ; dès lors elle abandonne sa chaleur latente. Un gramme de pluie régénère six cents calories, six cents fois la chaleur nécessaire pour le réchauffer de 1 degré, ou, si l’on veut, ce qu’il faudrait de chaleur pour amener 6 grammes d’eau à la température de l’ébullition : il en abandonne encore davantage à cause de la hauteur d’où il tombe. La pluie va donc réchauffer l’air, les objets terrestres et elle-même ; c’est un foyer véritable. On sait en effet que pendant l’hiver les journées et les nuits pluvieuses sont chaudes ; il ne gèle que par les temps secs.

On mesure dans tous les observatoires la quantité de pluie qui tombe. Voici comment on raisonne : Si la terre était partout horizontale et imperméable, une journée de pluie déposerait en un lieu donné, sur tous les points, une couche d’eau de même hauteur ; le lendemain et les jours suivans, la même chose arriverait, et à la fin de l’année, si toute cette eau était conservée, elle atteindrait une élévation finale qui ne varie pas beaucoup d’année en année ; on se contente de faire connaître cette élévation, qu’on appelle hauteur annuelle de pluie ; à Paris, elle est égale à 52 centimètres en moyenne. 1 centimètre carré de surface reçoit ainsi 52 grammes d’eau par an et une quantité de chaleur restituée correspondante, qui est égale à 31,200 calories, ce qui équivaut à la combustion de 4 grammes de charbon. Cette chaleur est énorme, elle suffirait pour fondre annuellement une couche de glace de 4 mètres d’épaisseur ; c’est la huitième partie de ce que le soleil envoie.

Mais cette eau ne demeure point sur le sol ; elle disparaît rapidement : une partie par l’évaporation directe, une autre par la végétation, le reste s’infiltre dans les terrains pour reparaître dans les sources et rejoindre les rivières. Parlons d’abord de l’évaporation. On la mesure aussi dans les observatoires, avec des instrumens spéciaux, des évaporomètres, et on l’exprime encore par la diminution de hauteur que la surface d’un lac éprouverait si elle n’était soumise à aucune autre cause de variation. A Montsouris, on l’a trouvée beaucoup plus grande en été qu’en hiver, ce qu’on aurait pu prévoir, et approximativement égale à 800 millimètres. Cette hauteur d’eau, que l’air pourrait absorber, est beaucoup plus grande que celle de la pluie qui tombe. La soif atmosphérique n’est donc point étanchée faute d’aliment ; elle n’est qu’en partie satisfaite. L’air contient de l’eau suspendue, mais pas autant qu’il pourrait en retenir ; il est humide, mais non pas saturé ; il ne peut l’être.

L’évaporation se fait sur les terrains et sur les objets mouillés ;