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III

Malgré tout l’intérêt que peut nous offrir l’étude de la rosée, ce phénomène n’est qu’un accident, que la conséquence d’une fonction météorologique bien autrement importante, le rayonnement nocturne et le refroidissement de la terre. Cette fonction mérite une étude plus complète. Je rappellerai d’abord les célèbres expériences de Dulong et Petit. Ces physiciens ont placé au centre d’un ballon de cuivre un thermomètre préalablement échauffé, et ils ont observé de seconde en seconde la vitesse de son refroidissement. Pour commencer, ils ont opéré dans le ballon vidé d’air, et ils ont reconnu que d’une part le thermomètre envoie de la chaleur aux parois et que de l’autre les parois en rendent au thermomètre. C’est un échange perpétuel. Quand le thermomètre est plus chaud, il envoie plus qu’il ne reçoit, c’est le contraire s’il est plus froid. Lorsque les températures sont égales, l’échange ne cesse pas pour cela, seulement l’enceinte et le thermomètre émettent et reçoivent des quantités de chaleur égales : ils sont en équilibre, mais en équilibre mobile, car si une cause vient le déranger, il se rétablit aussitôt. Cela fait, et après avoir exprimé mathématiquement la loi de ce refroidissement, Dulong et Petit ont introduit de l’air dans leur ballon et ont recommencé leur étude. Ils ont trouvé que ce gaz n’oppose aucun obstacle aux rayonnemens réciproques de l’enceinte et du thermomètre, qu’il les laisse passer comme s’il n’était pas là, comme si ses molécules étaient assez petites et assez distantes pour n’être pas affectées ni touchées par les ondes calorifiques. C’est la confirmation de ce que nous avons précédemment admis. Cet air pourtant n’est point sans action, il accélère beaucoup le refroidissement, et cela se comprend, car ses molécules, qui sont (en perpétuel mouvement, vont de l’enceinte au thermomètre et vice versa ; à chaque contact, elles partagent la température des surfaces qu’elles touchent ; elles portent ainsi de la chaleur du centre à la surface ou de la surface au centre, refroidissant le thermomètre s’il est plus chaud, le réchauffant s’il est plus froid. Les gaz ont ainsi, un pouvoir refroidissant qui leur est propre, qui varie avec leur nature, qui se distingue du rayonnement et qui s’y ajoute. Ils charrient la chaleur.

L’application de ces principes à l’atmosphère entière nous conduit à dire que pendant le jour les objets terrestres commencent par absorber les rayons du soleil, qu’ensuite ils échauffent l’air par leur contact, que, pendant la nuit, ils envoient vers l’espace par rayonnement la même somme de chaleur qu’ils enverraient dans le vide, que le rôle de l’air se réduit alors à rendre à ces mêmes