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choses ancien. C’est là surtout le caractère du second volume intitulé l’Italie et les Italiens, dont les différentes études, écrites au fur et à mesure que se déroulaient les conséquences du traité de Villafranca, portent beaucoup plus que celles du premier ouvrage la forme de plaidoyers. C’est de l’Italie qu’il s’agit, mais c’est aux partis français que s’adresse l’écrivain, et il ne laisse sans réfutation aucune de leurs allégations.

Vous prétendez, disait-il à ces partis, que la révolution italienne est une menace pour les conservateurs, et je vous réponds que l’indépendance italienne est au contraire une nécessité pour l’ordre européen, car seule elle peut mettre fin à l’anarchie qui est la conséquence fatale d’une situation détestable. Vous prétendez que la formation d’une nationalité italienne est une entreprise d’utopistes et de rêveurs, et je vous réponds que les seuls utopistes sont ceux qui prétendent faire vivre des pouvoirs qui tombent d’eux-mêmes. Comment voulez-vous maintenir ce qui renonce et se refuse à se défendre ? Là-dessus, pour appuyer son dire, il racontait les mésaventures tragi-comiques de ce chef carliste espagnol, Borges, qui, s’étant rendu en grande hâte dans le royaume de Naples pour défendre la royauté légitime, ne vit pas venir à lui un seul volontaire, et ne recueillit d’autre récompense de son zèle que d’être affamé, houspillé et dévalisé par les chefs de bandes qu’on lui avait désignés comme les champions de la monarchie et qui n’étaient en réalité que des chefs de voleurs ; ou bien encore, il citait ce mot légèrement sceptique du pape Pie IX disant, avec la fine ironie qui lui était propre, un jour qu’on lui montrait certains bataillons de volontaires pontificaux organisés par Lamoricière : « Ainsi donc c’est avec ces hommes que nous allons reconquérir nos provinces ? » Se récriait-on contre l’illégalité et la violence de l’entreprise de Garibaldi sur les Deux-Siciles, — vous oubliez, ripostait-il, que de pareilles entreprises ne sont point propres seulement à notre temps et que des gouvernemens peu imbus de principes révolutionnaires en ont fait de toutes semblables ; n’avez-vous donc jamais entendu parler d’une certaine expédition en Sicile exécutée par son éminence le cardinal Alberoni, ministre de Philippe V et d’Elisabeth Farnèse ? et il racontait l’histoire de cette entreprise médiocrement soucieuse du droit des gens. La révolution italienne, disaient certains optimistes portés au paradoxe, était l’œuvre d’un petit nombre d’ambitieux politiques, les Italiens ne demandaient rien et se trouvaient heureux de leur sort ; pour réponse, M. de Mazade retraçait la peinture de quelques-unes des existences italiennes de notre siècle, de celle du triste et éloquent Leopardi par exemple, le montrait fatalement victime d’un état social à la fois vulgaire et brutal qui lui refusait