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dans le Louvre n’y avait trouvé M. Barbet de Jouy et ses collaborateurs, si ces hommes vaillans n’avaient égaré les recherches des soldats qui s’enquéraient des délégués, à cette heure d’extermination sans merci, ceux-ci étaient victimes d’une exécution sommaire. Grâce au dévoûment des gens de bien que rien n’a pu détourner de leur devoir, grâce à Dieu, une telle abomination nous a été épargnée.

Au courant de sa note, M. Héreau me fait la leçon, c’est bien de la bonté de sa part. Il m’apprend que tous les honnêtes gens cherchent à effacer les traces de la commune. C’est là un lieu commun qu’il aurait dû s’épargner ; les honnêtes gens sont naturellement apaisés et désirent l’apaisement général ; il n’y a que les coquins qui ne soient pas apaisés et qui, loin de chercher à effacer les traces de la commune, n’attendent que l’heure propice pour achever de brûler ce qu’ils n’ont pas eu le temps d’incendier. M. Héreau, qui parle de ces matières, les a, sans aucun doute, étudiées ; il a lu les histoires de la commune que les communards ont inventées, il connaît leurs programmes, il est initié à leurs projets de « revendication, » il lit les journaux qui se publient en Suisse, en Belgique, en Angleterre ; il sait, en un mot, à quoi s’en tenir ; eh bien, il a pu se convaincre que si nous honnêtes gens nous sommes très apaisés, les souteneurs de la commune ne le sont pas du tout. Franchement l’heure est mal choisie pour émettre des aphorismes pareils ; la tache d’huile, la tache d’huile de pétrole laissée par la commune s’est répandue de Paris sur l’Europe entière, et en attendant que l’on brûle les capitales on s’occupe sérieusement à assassiner les souverains. M. Héreau croit que je fais une œuvre de parti, il est dans une erreur complète ; je ne suis d’aucun parti, mais il suffit d’aimer la liberté et la justice pour haïr la commune ; c’est pour cela que je la hais et j’admire que des gens semblent la défendre aujourd’hui qui la combattraient à outrance si elle sortait des ruines où elle a failli ensevelir Paris et la France entière.

Les communards et les journaux qu’ils protègent ou qui les protègent se sont emparés du cas de M. Héreau et ne m’ont point épargné les invectives. Il ne m’en chaut. Ils sont bien en colère contre moi tous ces pères Duchênes ; ils m’ont honoré de leurs injures ; ils ont eu raison, car j’en suis digne. Il est cependant une chose que je dois leur dire, au nom même de cette liberté, de cette égalité qu’ils invoquent sans cesse, auxquelles ils ne comprennent rien, et qu’ils n’ont jamais su pratiquer. Ils trouvent naturel et parfaitement légitime de raconter les crimes de Versailles, les crimes de décembre, les crimes de mai, les crimes de l’empire, les crimes de la monarchie, les crimes de l’armée, les crimes de la magistrature, les crimes du clergé, les crimes de l’assemblée ; il n’est pas une fonction qu’ils n’aient salie, pas une administration qu’ils n’aient calomniée, pas un homme qu’ils n’aient vilipendé, que ce soit le général Trochu, Jules Favre, Thiers, — le sinistre vieillard, comme