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mots : enseignement professionnel, cours industriels. Que sort-il de ces maisons ? Des commis, des employés, des comptables, des commerçans. « Tous ces petits bureaucrates des deux sexes arrivent au bout de leur stage avec une crainte : d’être forcés à se faire ouvriers, — mais avec un désir aussi : les garçons, d’être employés ; les filles, demoiselles de magasin. » En Allemagne, le même défaut d’équilibre dans l’instruction produit les mêmes abus que chez nous. L’enseignement ferait fausse route s’il discréditait le travail manuel ; il doit, au contraire, le mettre en honneur, en le rendant plus intelligent et plus profitable. Ces ateliers sont le plus sûr moyen pour attirer les familles et convaincre les conseils municipaux. En guidant et en abrégeant l’apprentissage, l’école rendra un service que les esprits les plus rebelles comprendront. Quant à la juste proportion de place et de temps qu’il convient d’accorder à ces exercices manuels, nous nous contenterions, au moins pour commencer, de ce que propose M. Gréard, qui, tout en combattant les idées de M. Salicis, finit par leur faire de raisonnables concessions : un atelier muni d’un certain nombre d’étaux et d’établis ; quatre heures de travail par semaine pour chaque élève, et la journée du jeudi. Ainsi l’école retournera aux préceptes du père de la pédagogie moderne, et ce que Rousseau avait imaginé pour son Emile deviendra la règle et le bien commun de tous.

Pour une raison empruntée au même ordre d’idées, nous souhaitons que l’internat, qui rend l’enfant étranger à sa famille, qui l’habitue à la vie entre quatre murs et qui le rend à la longue inhabile à se diriger, soit strictement écarté des écoles Turgot. Mieux vaut deux fois par jour un trajet de trois et quatre lieues, comme en font certains élèves des écoles municipales de Paris, que la domestication de l’interne. En plaçant le temps des classes entre dix heures du matin et cinq heures du soir, on permettra aux enfans de retrouver la famille, même à d’assez longues distances : personne n’est plus disposé à apprécier l’instruction que ces élèves voyageurs, tandis que souvent elle laisse indifférens ceux à qui elle s’offre sans déplacement et sans fatigue.

Même établie selon les meilleurs modèles, l’école primaire supérieure rencontrera de nombreux obstacles : pour en triompher, le ministre fera bien de consulter la double leçon contenue dans la loi de 1833. Plus d’une fois avant M. Guizot l’enseignement primaire avait été décrété : deux choses ont fait que cette loi n’est pas restée, comme les autres, une lettre morte. La première, c’est que la loi avait prévu les moyens d’exécution, non pas sous forme facultative, mais sous forme obligatoire pour le budget des communes. Procéder par la voie des encouragemens, au moyen de bourses, de