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et, sous la présidence de ce membre du centre ultramontain que nous avons déjà nommé, le baron von Schorlemer-Alst, le nombre des membres s’accrut rapidement. C’était la guerre déclarée aux lois de mai et au gouvernement du chancelier.

L’évêque de Mayence n’abandonnait pas son œuvre. Il poussait son clergé à s’occuper sans relâche de la question sociale. En 1871, il envoya une circulaire à tous les prêtres de son diocèse pour leur prescrire de dresser une statistique exacte du nombre et de la situation des ouvriers de leur paroisse. Dans l’assemblée générale des catholiques allemands qui se tint à Mayence en septembre 1871 sous l’inspiration de Mgr von Ketteler, on s’occupa longuement de la question ouvrière. Voici quelques-unes des résolutions prises à ce sujet. Il est nécessaire, au moyen d’une commission d’enquête composée d’ouvriers et de ceux qui les emploient, d’établir quelle est la condition morale et matérielle, afin que la législature puisse éditer un code du travail (Arbeitsrecht). La propriété foncière, l’industrie, le commerce, jouissent d’une protection juridique, et le droit du travail n’est pas reconnu, quoique les travailleurs forment 90 pour 100 de la population. L’assemblée recommande de nouveau instamment l’établissement d’associations chrétiennes-sociales pour les maîtres-ouvriers, pour les ouvriers de fabrique, pour les jeunes gens, pour les femmes et pour les jeunes filles, et elle rappelle aux classes aisées que c’est leur strict devoir de venir largement en aide à ces institutions. L’assemblée déplore la situation des habitations ouvrières qui sont un scandale pour un pays chrétien, et elle insiste vivement pour qu’il se forme des sociétés de construction qui bâtissent des maisons saines et à bon marché. La proposition de blâmer les grèves fut rejetée à une grande majorité.

Ce qui précède suffit pour montrer l’esprit qui inspire le mouvement catholique-socialiste. L’œuvre commencée par Mgr von Ketteler a pris une extension considérable dans ces dernières années. Le clergé s’y est dévoué partout avec ardeur, parce que c’était un moyen de gagner des adhérens, dans les luttes du Kulturkampf, au profit de l’église et contre le gouvernement. Parmi ceux qui marchent au premier rang, on cite maintenant le recteur Schings et le vicaire Kronenberg, d’Aix-la-Chapelle, le vicaire Laaf, d’Essen, et le Domcapitular E. Klein, de Paderborn. Leurs efforts tendent à amener un rapprochement de plus en plus étroit avec les démocrates-socialistes. Pour marcher au scrutin les deux partis s’entendent; mais dès qu’il s’agit d’organiser des sociétés, la lutte éclate. Ainsi au mois de février dernier avait lieu à Essen une réunion générale des délégués des associations d’ouvriers mineurs. Il s’agissait de fonder une vaste fédération qui aurait réuni les mineurs de toute l’Allemagne. Un combat oratoire des plus vifs ne tarda pas à s’engager