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fêtes religieuses. Il ne faut pas mettre à leur tête des prêtres, mais des personnes sûres qui aient toute la confiance du clergé. On peut nommer membres d’honneur des gens riches et même des chefs d’industrie, mais on ne peut les admettre dans les conseils d’administration. Il faut surtout éviter de paraître se mettre à la remorque du capital (im Schlepptau des Kapitals). Il ne faut point rejeter d’une manière absolue la coalition et la grève; ce serait perdre toute influence sur les ouvriers. D’ailleurs, dans l’état actuel de l’industrie, c’est leur seul moyen de se défendre et de faire valoir leurs droits. Il ne faut point s’occuper de politique, à moins qu’il ne s’agisse des intérêts de l’église. Dans ce cas, il faut se jeter dans la lutte avec toutes ses forces. Il convient d’organiser des réunions le dimanche, afin d’y discuter tout ce qui concerne la question sociale. Les associations de compagnons, les associations d’ouvriers de fabrique et les associations de paysans sont les trois branches de la grande confédération sociale; il est nécessaire d’établir entre elles une alliance étroite. — On voit quelle perspective grandiose s’ouvre ici. Il ne s’agit de rien moins que d’unir dans une fédération générale, soumise à l’église, les forces vives du peuple des ateliers et des campagnes de toute l’Allemagne. C’est plus qu’un état dans l’état; c’est la société elle-même, embrigadée et disciplinée par des ecclésiastiques qui auraient étudié à la fois la théologie et l’économie politique.

La commission centrale posait avec beaucoup de sagesse la limite d’action de chaque groupe. Autonomie locale, mais unité d’action au profit de l’église, tel est le principe. Il ne faut pas, disait la commission, qu’une de nos associations s’imagine apporter la solution toute prête de la question la plus difficile de celles qui occupent le monde contemporain, et prétende imposer comme une révélation messianique telle organisation qu’elle aura jugée la meilleure. Chaque association chrétienne-sociale doit se mouvoir librement sur le terrain qu’elle s’est choisi. C’est à elle à tenir compte des besoins de ses membres et des nécessités locales. Vouloir imposer à toutes les mêmes règlemens, c’est fermer la porte à l’avenir et couper les racines de tout développement original. Ce n’est pas d’elles que peuvent sortir les organes dont l’église se servira pour résoudre définitivement les difficultés que doit rencontrer l’organisation d’une société meilleure et vraiment chrétienne. Quand l’heure sera venue, le chef de la catholicité évoquera les ministres entre les mains desquels on pourra remettre ce soin en toute confiance. Ces espérances mystiques plaisent au peuple. C’est d’ailleurs une grande idée, qui certes ne peut nuire à l’influence du clergé, que de confier au pape la réforme économique. Le saint-père se présente ici comme un nouveau messie qui réalisera tes promesses du millenium