Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 30.djvu/281

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il commença, en 1847, la série des recherches qui devaient prouver que le sucre existe normalement dans le sang, en dehors des actes de la digestion, et indépendamment de la nature de l’alimentation; en 1849, il démontrait que le sucre non-seulement est un des élémens constans du sang, mais encore qu’il est une production même de l’organisme animal. Enfin, en 1853, il publiait son fameux mémoire qui a pour titre : Nouvelle fonction du foie considéré comme organe producteur de matière sucrée chez l’homme et chez les animaux. Tout en poursuivant ses études sur la glycogénie animale, il publiait, en 1851, ses premières expériences relatives à l’influence du grand sympathique sur la sensibilité et la calorification, expériences qui devaient aboutir à la découverte capitale de l’innervation vaso-motrice.

On le voit, les travaux et les découvertes s’accumulaient; ils valaient à Claude Bernard une renommée précoce. La célébrité, une saine popularité, celle qui ne doit rien qu’à l’éclat des vérités conquises, allaient aplanir tous les obstacles devant lui. Claude Bernard est d’abord nommé suppléant de Magendie au Collège de France; en 1854 on crée pour lui, à la Sorbonne, une chaire de physiologie expérimentale; en 1855, il remplace définitivement Magendie au Collège de France; en 1868, Flourens meurt; Claude Bernard abandonne la chaire de physiologie expérimentale de la Faculté des sciences, pour occuper, au Muséum d’histoire naturelle, la chaire de physiologie générale que Flourens laissait vacante. De la sorte, il embrassait la physiologie tout entière : au Collège de France, la physiologie expérimentale, celle de recherches, de vivisections, d’applications médicales; c’était sa chaire de médecine, comme il l’appelait ; au Muséum, la physiologie générale, les considérations élevées sur les caractères primordiaux de la vie, la discussion des problèmes fondamentaux que soulève la vie sous ses formes diverses, et dans toute la série animale et végétale. Ces questions souveraines n’étaient pas celles qui le préoccupaient le moins, surtout dans la dernière moitié de sa carrière.

Ce n’était pas seulement au Muséum d’histoire naturelle que la succession de Flourens était dévolue à Claude Bernard. L’Académie française la lui attribuait de son côté, et appelait à elle cet explorateur pénétrant du monde de la vie, qui, en outre de ses publications didactiques et de pure science expérimentale, donnait à cette Revue des études d’une forme saisissante et d’une pensée profonde. Qui ne se rappelle les études sur la Physiologie du cœur; sur les Fonctions du cerveau; sur le Curare; le Problème de la physiologie générale; l’étude sur le Progrès dans les sciences physiologiques? Le savant, le grand expérimentateur parlait là pour