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viennent après sa libération tous les renseignemens qu’on reçoit et qu’on sollicite soit de lui-même, soit de ceux qui l’emploient. Si ces renseignemens font défaut, mention est faite de la cause présumée de la disparition avec la date des dernières nouvelles. Toutes les lettres qu’on reçoit du jeune libéré y sont soigneusement classées, de sorte que, si ce livre n’a comme document statistique qu’une valeur relative, il en a une grande au point de vue moral. Il n’y a pas de meilleur moyen d’apprécier la nature et les résultats de l’éducation donnée dans une école, les soins que les enfans ont reçus, l’effet que ces soins ont produit, et je crois qu’il y aurait tout avantage à ce que la tenue de ce livre fût imposée en France aux directeurs des colonies publiques et privées.

Les résultats ainsi obtenus donnent pour les garçons sortis des écoles de réforme une proportion de 72 pour 100 se conduisant bien contre 14 pour 100 tombés en récidive en trois années de libération, et pour les filles une proportion de 74 pour 100 contre 6 pour 100, le reste douteux ou disparu. Pour les écoles industrielles, la proportion est de 79 pour 100 se conduisant bien contre 5 pour 100 tombés en récidive en ce qui concerne les garçons, et de 81 pour 100 contre 3 pour 100 en ce qui concerne les filles, le reste également douteux ou disparu. Ces résultats sont assurément satisfaisans, mais il ne faut pas oublier que l’imperfection des statistiques doit laisser échapper les récidives des enfans qui en assez grand nombre sont portés comme douteux ou disparus. A un autre point de vue qui a son intérêt, ils se décomposent d’une façon assez différente suivant qu’il s’agit des écoles protestantes ou des écoles catholiques. En ce qui concerne les garçons, la supériorité paraît être du côté des écoles protestantes ; mais les écoles catholiques prennent leur revanche lorsqu’il s’agit des filles, surtout dans les écoles industrielles. Les chiffres de la statistique ne me paraissent donc justifier qu’en partie l’impression peu favorable aux écoles catholiques que j’ai recueillie dans la conversation et même dans les rapports des inspecteurs de ces écoles. Je citerai cependant pour son originalité une critique qui m’a été faite et dans laquelle entre peut-être une part de vérité. « Dans les écoles catholiques, me disait-on, on prend trop de soin des enfans, » et, comme je demandais quelques explications, on ajoutait : « On s’attache trop à obtenir l’obéissance par l’affection, sans développer le sentiment de la responsabilité, et quand cette affection vient à faire défaut, l’enfant succombe sans résistance. »

Quant à l’influence des deux lois de 1854 et de 1866 sur la criminalité générale de l’Angleterre, c’est une question beaucoup plus difficile à apprécier. Au premier abord l’influence peut paraître