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enveloppée d’une toile imperméable qui communique par l’intermédiaire d’un tube en caoutchouc avec un réservoir placé à 10 mètres au-dessus du sol et qui contient la substance à injecter. La pression due à cette élévation, exercée sur la section de la pièce, suffit pour en expulser la sève et pour y substituer le liquide conservateur. La durée de l’opération varie suivant le degré de siccité du bois, la grosseur des tronces et l’état de l’atmosphère; mais elle est d’au moins cinq heures, One fois injectées, les billes sont débitées en traverses à l’aide d’une scie mécanique. Un autre procédé consiste à injecter les traverses en les plaçant dans un cylindre dans lequel on fait passer un courant de vapeur d’eau qui entraîne les gaz et les matières solubles contenues dans le tissu ligneux et qu’on condense ensuite de manière à opérer dans le cylindre un vide à peu près complet. On introduit alors le liquide antiseptique auquel on donne une pression de 6 à 8 atmosphères, et qui pénètre dans tous les pores du bois. L’opération ne dure qu’une demi-heure et ne revient pas à plus de 70 centimes par traverse, tandis que par le premier procédé le coût est de 1 franc. Certaines compagnies de chemins de fer préfèrent la créosote au sulfate de cuivre; d’autres, après avoir carbonisé le bois pour en détruire les élémens fermentescibles, l’immergent dans un bain de coaltar pour le mettre à l’abri du contact de l’air. Les traverses ainsi préparées ont une durée moyenne de dix à douze ans et coûtent, rendues sur place, environ 3 fr. 50 cent, l’une. Dans les forêts soumises au régime forestier, 75,000 mètres cubes de hêtre sont annuellement débités de cette façon.

C’est surtout comme bois d’industrie que le hêtre est recherché. On le scie en planches et en madriers de diverses dimensions pour l’employer ensuite dans l’ébénisterie et la carrosserie. On en fait des pieds de tables, des châssis et panneaux délits, des fonds et des sièges de voitures, des meubles de cuisine, etc.; on le fend en douelles pour la fabrication des tonneaux à encaquer les harengs, le beurre, le savon et autres matières solides; on le travaille en forêt pour faire des sabots, des jantes de roues, des moyeux de voitures, des oreilles de charrues, des sébiles, des plats, des bois de chaises, des attelles de colliers, des bâts, des cerches pour tamis, des pelles, des galoches, des boîtes à sel, des jouets d’enfans, des soufflets, des bois de brosse, des formes de boutons et une multitude d’objets divers dont l’exposition nous offre les innombrables échantillons. Toutes ces industries, spécialisées suivant les localités, occupaient jadis un grand nombre d’ouvriers qui passaient en quelque sorte leur vie dans les bois; on n’en rencontre plus aujourd’hui que fort peu, la plupart déjà âgés, car les nouvelles générations dédaignent ces travaux qui faisaient vivre honnêtement