fin de compte, la France n’avait obtenu de son intervention que d’avoir attaché à ses flancs deux voisins dangereux par leur puissance démesurément accrue. Tout le monde se dit que la grandeur est une chose relative, et qu’un pays peut être diminué, tout en restant le même, lorsque de |nouvelles forces s’accumulent autour de lui. »
Le dévoûment du ministre d’état à l’empereur ne le cédait en rien à celui de l’ancien ministre des finances. Mais M. Magne, dès la date du 20 juillet, jugeait que, notre politique étant mal engagée, il ne lui restait qu’à se recueillir, à réduire ses prétentions au niveau de nos ressources militaires, tandis que M. Rouher, plein de confiance dans les ouvertures qui nous arrivaient du quartier général aussi bien que dans les protestations dont nous accablait le comte de Goltz, croyait encore à la date du 6 août que notre ascendant moral suffisait pour nous ouvrir les portes de Mayence et pour nous procurer le Palatinat. Ces deux hommes d’état s’inquiétaient au même degré de l’opinion publique, ils ne différaient que touchant la mesure des satisfactions que nous serions à même de lui assurer.
L’opinion publique, à cette heure avancée du règne, était en effet le grand souci du gouvernement impérial; c’est d’elle qu’il se préoccupait lorsque, pour faire oublier le Mexique, il autorisait en quelque sorte les puissances allemandes à se déclarer la guerre, et c’est elle qui, ne se souvenant plus de ses propres entraînemens, irritée par tant de mécomptes, implacable et impérieuse, s’imposait aux résolutions de ceux qui avaient excité ses appétits sans réussir à les satisfaire.
L’esprit frondeur gagnait de proche en proche jusqu’aux entours du trône, et, comme il arrive toujours en France aux heures de crise, ceux-là mêmes qui avaient préconisé la politique des nationalités renchérissaient sur l’opposition et lui fournissaient les argumens les plus dangereux. Les conseillers accouraient en foule; le gouvernement, ayant conscience de ses erreurs, tiraillé entre les avis les plus contradictoires, ne savait plus à quel parti s’arrêter. On disait la France humiliée, et les gens qui avaient protesté contre toute rectification de frontières se sentaient pris tout à coup du désir de voir leur pays ressaisir ses anciennes délimitations. On demandait des compensations territoriales et, sans se préoccuper des moyens d’action, on mettait le gouvernement en demeure d’aviser. On lui reprochait à la fois d’avoir sacrifié l’Autriche à la Prusse et cependant de n’avoir pas assez favorisé la Prusse pour mériter sa reconnaissance.
A mesure que l’on approche du dénoûment, le cœur se serre et l’esprit s’irrite davantage. On cherche les responsabilités, on voudrait