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le quartier général, qui venait de s’établir à Nikolsbourg. Le roi s’était installé dans le château appartenant au comte de Mensdorf. Le ministre des affaires étrangères d’Autriche ne se doutait pas assurément en déclarant la guerre à la Prusse qu’avant deux mois les portraits de ses ancêtres présideraient à la signature de préliminaires qui devaient consacrer la dissolution de la confédération germanique.

L’Autriche, en voyant l’empereur impuissant à Florence et incapable de lui prêter une assistance effective, s’était résignée à son sort. Elle souscrivait à toutes les exigences de la Prusse, sauf la perte de la Silésie et le sacrifice de la Saxe, qui, à l’encontre de ses autres alliées, s’était résolument et loyalement compromise pour elle. À son retour de Vienne, M. Benedetti trouva le président du conseil fort irrité contre son représentant à Paris. Il l’accusait d’avoir méconnu ses instructions en accédant à nos préliminaires, sans avoir obtenu satisfaction sur une des conditions essentielles de la paix, la contiguïté des territoires, dont le roi n’entendait pas se départir. Et cependant il lui avait fait connaître les intentions de sa majesté, dès le 8 juillet, dans une dépêche datée de Pardubitz ; il ne lui avait pas laissé ignorer que le cabinet de Berlin se croyait autorisé par ses succès à réclamer un agrandissement important. Bien plus, il l’avait invité à s’en expliquer avec le gouvernement de l’empereur. Il lui avait prescrit d’indiquer comme maximum des prétentions de la Prusse l’annexion des pays occupés par ses armées dans le nord de l’Allemagne. Mais ces prescriptions n’étaient pas absolues, il était autorisé à réduire ses demandes successivement à un minimum qui devait se composer de l’un des quatre cercles de la Saxe ; de deux fractions du Hanovre comprises, l’une à l’ouest du grand-duché d’Oldenbourg, l’autre au sud de Brunswick ; enfin de la partie delà Hesse-Electorale enclavée dans le territoire prussien. Il était dit que M. de Goltz ferait le désespoir de son ministre ; il avait pris le contre-pied de sa politique en 1864, il s’était montré équivoque en 1865, lors de l’incident de Gastein, et cette fois sa conduite était presque criminelle.

M. Benedetti n’avait pas à suivre M. de Bismarck sur le terrain des récriminations ; il lui appartenait moins encore d’apprécier la conduite de son agent. Il aima mieux faire ressortir tous les avantages que les préliminaires assuraient à la Prusse. C’était l’annexion des duchés de l’Elbe, la dissolution de la confédération germanique, et la création d’une confédération du nord, dont toutes les forces seraient placées sous le commandement du roi.

M. de Bismarck n’en disconvint pas, mais ces résultats, selon lui, touchaient peu le roi et satisferaient moins encore l’armée et l’opinion