la lutte corps à corps avec ses adversaires au sein du conseil et au besoin se démettre plutôt que de se soumettre.
On raconte que pendant ces jours de crise l’empereur se promenait, malade et accablé, dans le parc de Saint-Cloud, en proie aux plus cruelles perplexités ; il demandait conseil à tout le monde, il interrogeait anxieusement ses généraux, il supputait avec eux les ressources dont il pourrait disposer, et, au bout de ses calculs, il croyait voir apparaître une catastrophe. Il se flattait d’autre part, sa nature étant sujette aux illusions, que le roi Guillaume, lui sachant gré d’une neutralité qui causait à Berlin plus d’étonnement que de reconnaissance, lui tiendrait compte de son abnégation et que, sans réaliser toutes les belles promesses qui coûtaient si peu à M. de Bismarck, la Prusse donnerait cependant satisfaction aux inquiétudes jalouses de la France.
Pendant quelques jours, il fut question d’envoyer le prince Napoléon en Italie ; c’était la dernière carte sur laquelle on comptait pour vaincre les résistances du roi Victor-Emmanuel et de son gouvernement. On y renonça, soit que le prince déclinât la mission, soit qu’on en reconnût l’inutilité. Dans le conseil des ministres tenu le 10 juillet, la politique d’assistance invoquée par le prince de Metternich et soutenue par le ministre des affaires étrangères succombait définitivement devant les considérations italiennes, plus encore que devant les préoccupations militaires. Cela est si vrai que nous verrons le ministre d’état, la question vénitienne une fois apaisée, se rallier et s’associer à la politique des compensations. Ce n’est que quelques jours plus tard, après un dernier et vigoureux effort du prince Napoléon[1], que la politique d’intervention sur le Rhin succombait à son tour[2].
M. de Goltz et M. Nigra restaient maîtres du terrain. Ils avaient l’un et l’autre bien mérité de leur pays.
G. ROTHAN.
- ↑ Note du prince Napoléon à l’empereur en date du 14 juillet. — Papiers des Tuileries.
- ↑ « L’empereur dit à M. Drouyn de Lhuys qu’il avait changé d’avis et qu’il était résolu à se borner au rôle de médiateur pacifique entre les deux belligérans. M. Drouyn de Lhuys, qui vit dans ce revirement l’influence de ses adversaires, en éprouva un vif désappointement sans pouvoir se refuser à servir l’empereur en un pareil moment et à faire tant bien que mal l’essai de la médiation » (Hansen).