ni dans le congrès de Chartres ; elle est dans ce calme universel d’un pays qui travaille, qui est tout entier à son industrie, à ses affaires, et qui ne demande qu’à être mis à l’abri de convulsions nouvelles. Le vrai sentiment public, il éclatait l’autre jour dans ce service de Notre-Dame où l’on allait honorer la mémoire d’un homme illustre, M. Thiers, qui reste populaire précisément pour sa raison modérée, pour son esprit de patriotisme, pour l’habileté prudente avec laquelle il a su, aux jours des crises terribles, dégager la France des misères de l’invasion étrangère et de la guerre civile. La vie nationale réelle et sérieuse, elle est, non dans des conciliabules de coteries ou de sectes, mais dans le développement simultané et souvent invisible de toutes les activités pratiques, dans cet effort incessant pour réparer d’immenses désastres, pour relever jour par jour la puissance française ; elle est dans ces manœuvres qui se poursuivent de toutes parts, au midi comme au nord, à l’est, autour de Lyon comme autour de Paris, et qui sont l’apprentissage de notre armée nouvelle. Elle apparaît aussi à travers ces excursions que font les membres du gouvernement, qui mettent les chefs des administrations supérieures en rapport avec les populations et qui ont pour heureux effet de substituer aux vaines polémiques, aux déclamations, une politique d’enquête directe et d’instruction pratique. C’est là ce qu’on pourrait appeler la situation réelle, situation peu dramatique sans doute et peu accidentée, mais assez rassurante et assez forte pour n’être pas facilement ébranlée.
Un des plus intéressans épisodes de cette saison d’automne, c’est assurément le voyage que M. le ministre des finances et M. le ministre des travaux publics viennent de faire dans les provinces du nord. M. Léon Say et M. de Freycinet sont allés ensemble dans ces industrieux départemens, à Boulogne, où l’on construit un port en eau profonde, à Calais, à Dunkerque, à Lille, qui de mémoire d’homme, selon la remarque du président de la chambre de commerce, n’avait reçu la visite officielle d’un ministre. Tout s’est passé pour le mieux, cela va sans dire, et on comprend que M. de Freycinet se plaise à ces excursions, puisqu’il y réussit ; il a partout un langage séduisant de netteté et de sincérité. M. Léon Say a eu de son côté à Calais comme à Boulogne le succès d’une parole simple, instructive et familièrement ingénieuse ; mais, à part l’accueil flatteur que les deux ministres ont trouvé partout sur leur passage, ce voyage a évidemment une importance exceptionnelle pour plusieurs raisons, et il est fait pour laisser après lui une favorable impression. D’abord il était resté un certain doute sur le caractère, sur l’opportunité de ce vaste programme de travaux publics que M. de Freycinet a inauguré dans la session dernière devant les chambres et pour l’exécution duquel il a besoin du concours de M. le ministre des finances. Ce programme, qui embrasse les chemins de fer,