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LE CONSEIL D’ETAT
ET
LES RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIRS

La juridiction administrative a été, à diverses reprises, l’objet d’attaques très vives. Ce ne sont pas seulement son organisation, ses formes de procéder, l’étendue de ses attributions, qui ont été contestées ; son existence même a été mise en question, et l’on a pu croire, à certains momens, qu’elle était condamnée par l’opinion libérale. Et cependant elle est toujours debout, et les différentes assemblées législatives qui avaient entendu se produire ces attaques ont toutes, quel que fût le régime politique, ajouté des attributions nouvelles à celles dont le conseil d’état et les juridictions qui lui sont subordonnées étaient investis. Il y a là un fait dont il peut être intéressant de rechercher les causes.

Il s’est trouvé des hommes considérables pour soutenir que l’existence de la juridiction administrative était contraire au principe de la séparation des pouvoirs, tel que l’entendait Montesquieu; que l’assemblée constituante de 1789, en l’organisant, avait commis une erreur à laquelle l’avaient entraînée ses préjugés contre les parlemens, qu’il ne pouvait pas y avoir deux ordres de justice, que l’autorité judiciaire seule devait statuer sur les réclamations formées contre l’administration quand elles avaient pour base un texte de loi, de règlement ou de contrat. On a même été jusqu’à prétendre que la justice administrative était organisée pour donner toujours gain de cause à l’état, et l’on s’efforçait de le prouver en faisant ressortir les dispositions anormales qui, pendant un certain temps, ont réglé la constitution du personnel et le mode de procéder de ces juridictions.

Si ces reproches eussent été fondés, l’institution attaquée aussi