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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet 1878.

Maintenant que la guerre d’Orient est finie et que la paix générale est assurée, maintenant que M. de Bismarck, après avoir présidé son congrès à Berlin, a pu aller prendre ses eaux à Kissingen, et que lord Beaconsfield, après avoir eu ses succès de surprise, a savouré les ovations en rentrant à Londres, maintenant enfin que tout est réglé, que l’Europe compte un traité de plus et que l’empire turc a quelques provinces de moins, une phase nouvelle commence. Cette œuvre du congrès de Berlin, que tous les cabinets s’empressent de ratifier, elle date à peine d’hier, de quelques semaines ; il s’agit aujourd’hui de savoir comment elle sera exécutée, ce qu’elle va devenir, quelles conséquences elle aura pour l’Orient, quelle influence elle est destinée à exercer sur la politique et les relations des diverses puissances dans l’Occident.

C’est la paix reconquise et maintenue pour l’instant, oui sans doute, c’est du moins la fin d’un conflit qui a été sur le point de prendre une dangereuse extension. C’est à un certain point de vue, si on le veut bien, une victoire de l’esprit de transaction ; mais, si c’est d’un côté le dénoûment de la sanglante crise dont l’impatience de la Russie a donné le signal depuis dix-huit mois, cet ordre nouveau que le congrès de Berlin a eu la prétention de consacrer et d’organiser reste assurément la plus redoutable des énigmes. Cette paix ébauchée par le traité de San-Stefano, rectifiée et amendée par le traité du 13 juillet, complétée ou éclairée par les conventions particulières qui l’accompagnent, cette paix ouvre pour l’Europe de singulières perspectives ; elle aura probablement d’étranges épreuves à subir. Nous n’en sommes encore qu’à la transition, aux premières mesures d’exécution ou, si l’on veut, à la prise de possession des gages qu’on s’est assurés de toutes parts. L’Autriche va entrer en Bosnie avec une armée nombreuse, elle a déjà lancé son manifeste caractérisant l’occupation dont elle se charge. L’Angleterre n’a