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notre édification. Suivent, dans des bocaux ou dans des casiers, le froment, le millet, l’orge, le maïs ; puis viennent les légumes, haricots, pois, pommes de terre et patates douces, carottes, laitues, betteraves, gingembres, tomates, gourdes, concombres, épinards, porreaux, ail, radis, chicorée, fenouil, citrouilles, navets, asperges, les champignons, les racines de bambou et les lis dont les oignons sont comestibles, etc. Le daikon mériterait une place à part. C’est une sorte de rave gigantesque d’un pied de long, qui se mange après avoir été soumise en grosses meules à une sorte de fermentation putride, dont elle conserve une forte odeur ammoniacale. Point de repas indigène où ce condiment ne figure pour assaisonner le riz.

Le meilleur guide à consulter pour examiner ces plantes est le livre consacré à la flore du Japon par le Dr Savatier, et qui a pour titre : Enumeratio plantarum in Japonia sponte crescentium. Rattaché géographiquement au continent asiatique et même à l’Amérique par le nord, se rapprochant par le sud des archipels océaniens, le Japon emprunte à ces divers climats une grande variété de richesses botaniques. Les arbres à fruit n’y sont pas rares ; on y trouve la pomme, la poire, l’abricot, la pêche, la châtaigne, la noix, la grenade, la figue, la banane, l’orange, le limon, le citron et un fruit péricarpe, le kaki, que les Anglais nomment persimmon, et dont l’analogue, croyons-nous, n’existe pas en France. Tous ces fruits sont, par leur saveur, inférieurs aux nôtres. Le raisin est excellent. Les fraises poussent à l’état sauvage, mais n’ont aucun goût. Le cerisier donne des fleurs, mais ne porte pas de fruits.

Une petite verrière comprend quelques-uns des gâteaux et bonbons les plus usuels, diverses pâtes comestibles ; le udon, sorte de macaroni, et une espèce de vermicelle appelée somen, y ont leur place à côté des pâtes de haricot et des algues marines. Il faudrait en rapprocher le soyu, cette liqueur préparée avec le blé fermenté, qui mériterait de figurer sur nos tables à côté des meilleurs sauces anglaises, et le katsuobushi. Ce dernier comestible se présente sous la forme d’une pierre à aiguiser les faux ; il consiste dans des filets de bonite salés, séchés et fumés, dont on racle quelques copeaux dans une salade de concombres, en guise d’assaisonnement. Voici plus loin des blocs de camphre, de cire, de suif, du sel marin, des huiles de pavot et de ricin, puis des spiritueux, dont le petit nombre fait honneur à la sobriété bien connue des Japonais. Le saki ou bière de riz, et dans le sud une liqueur extraite des patates, suffisent à toutes les gourmandises. A l’exception du gibier et du poisson, la nourriture des Japonais est, comme on le voit, principalement végétale. Le riz y joue le même rôle que le pain chez nous, et les quelques provinces où il ne pousse pas sont regardées comme