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soulèvement de l’Ionie. Concentrée dans les eaux de Samos, elle tint toute la côte voisine en respect. Au retour du printemps, les Grecs, soit que leur flotte eût fait de grandes pertes à Salamine, soit que le zèle des confédérés se fût ralenti, ne trouvèrent à réunir que 110 vaisseaux. Deux nouveaux amiraux commandaient cette escadre : Léotychide pour les Spartiates et leurs alliés, Xantippe pour les Athéniens. La flotte grecque se rassembla dans les eaux d’Égine. Des messagers ioniens vinrent aussitôt la presser de passer en Asie. « L’Ionie n’attendait, disaient-ils, que l’apparition de quelques vaisseaux grecs pour se soulever. » Léotychide et Xantippe se portèrent à Délos ; ils n’osèrent jamais aller au-delà. Samos était devenue pour les descendans des conquérans de Troie de nouvelles colonnes d’Hercule. La navigation avait donc fait peu de progrès depuis l’invention de la trière, probablement parce que la trière, avec ses deux étages, perdit en qualités nautiques ce qu’elle gagnait en efficacité militaire. Le galion est resté empêtré là où passait gaîment la caravelle ; le navire cuirassé nous fera regretter plus d’une fois les agiles frégates de notre jeunesse. Il faut dire cependant que ce qui retint à Délos les nouveaux navarques, ce ne fut pas uniquement l’appréhension de tenter une traversée pour laquelle les Grecs rassemblés en Aulide ne demandaient aux dieux qu’un vent favorable, traversée que Léotychide et Xantippe eux-mêmes affrontèrent plus tard ; ce fut aussi la crainte de se jeter au milieu d’îles qu’ils savaient ou croyaient encore remplies de troupes. De mutuelles alarmes maintinrent ainsi, pendant tout le printemps, une zone neutre entre Délos et Samos.

Aussitôt que les chevaux de la cavalerie perse eurent brouté sur les bords du Sperchius l’herbe du printemps, Mardonius, entraînant à sa suite Thessaliens et Thébains, vint de nouveau occuper Athènes. Ses éclaireurs avaient déjà foulé le territoire de Mégare, et il se préparait à passer dans le Péloponèse, quand il apprit que l’isthme de Corinthe, fortifié avec une activité extraordinaire, était devenu inexpugnable. Les Perses savaient ce que leur avait coûté la conquête des Thermopyles ; ils n’étaient plus en mesure de renouveler ces sacrifices. D’un autre côté, il ne pouvait convenir à Mardpnius de rester dans l’Attique, pays pauvre, ruiné, où son armée n’eût pas tardé à connaître la disette. L’Attique eût d’ailleurs été pour les Perses un très mauvais champ de bataille, car le sol tourmenté s’y prête mal aux manœuvres de la cavalerie. Mardonius se hâta en conséquence de rétrograder vers Thèbes. En se retirant, il fit, selon la coutume invariable des barbares, le vide devant lui et alla établir son camp le long de l’Asope, sur le rêvera du Cithéron. Les Grecs, sous le commandement de Pausanias, s’étaient pendant