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de faire des tournées régulières. En 1868, ce service médical et sanitaire ne coûtait encore aux zemstvos que 1,200,000 roubles, en 1874 il absorbait déjà 3 millions 1/2 de roubles. Perm et Viatka consacrent annuellement à la santé publique chacun près de 500,000 roubles. Si les institutions et les mesures administratives pouvaient en quelques années transformer les mœurs, ou s’il était aussi facile d’encourager l’hygiène que la médecine, les zemstvos auraient par là rendu à leur pays un inappréciable service.

Une chose m’a d’abord surpris dans ces budgets provinciaux, c’est l’exiguïté ou la modicité relative des crédits affectés aux routes et chemins. Ces crédits, bien qu’eux aussi en notable accroissement, ne montaient encore vers 1875 qu’à 2 millions et 1/2 de roubles, c’est-à-dire à un peu moins de 10 pour 100 du budget total des zemstvos (près de 26 millions). Dans un pays où les moyens de communication, routes et ponts, sont si défectueux et si nécessaires, comment s’expliquer d’aussi faibles allocations ? C’est que, malgré leurs besoins de routes et de débouchés pour leur agriculture, la plupart des provinces ont des besoins encore plus urgens. L’état moral et intellectuel, l’état économique du peuple, ont contraint le zemstvo à se charger de soins ailleurs confiés ou abandonnés à l’initiative privée. Le service médical n’est pas le seul de cette sorte. Héritières d’une administration habituée à tout faire, préposées à la direction de contrées que la double tutelle du servage et de la centralisation avait dressées à l’indifférence et à l’apathie, chargées des intérêts d’un peuple qui souvent n’avait même pas conscience de ses propres besoins, les assemblées territoriales ont été obligées de prendre à leur compte ce rôle de providence, partout convoité, et presque partout si mal joué par la centralisation et la bureaucratie.

Service sanitaire et assistance publique, service de prévoyance pour les approvisionnemens et greniers d’abondance, mesures contre les épidémies et les épizooties, tout ce qui touche aux intérêts publics ou privés des provinces et des campagnes retombe sur les états provinciaux. L’assistance publique leur coûtait dans les dernières années près de 2 millions de roubles, en outre des 2 millions et 1/2 consacrés au service médical. C’est encore là un chapitre que la guerre est en train de grossir démesurément. La double campagne des Russes en Europe et en Asie a préparé à la bienfaisance administrative un innombrable contingent de malades, de blessés, d’estropiés, de veuves et d’orphelins.

Une autre obligation des zemstvos est d’assurer l’alimentation publique, c’est là une tradition ou un legs du servage. Aujourd’hui comme avant l’émancipation, chaque commune doit avoir ses