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sections, se creusant en alvéoles, se projetant en saillies prismatiques, montent en encorbellement les uns sur les autres jusqu’au sommet de la coupole. Les vives couleurs des vitraux des fenêtres et les nuances infinies des tapis se reflètent dans ces stalactites artificielles dont les facettes multiples jettent les feux polychromes d’un diadème de pierreries.


III

Bien que l’Égypte ait subi toutes les conquêtes et toutes les dominations, elle se souvient de temps à autre de ses anciens Pharaons. Quand elle se présente à l’étranger, elle se paré volontiers, comme d’un habit de gala, des grandioses architectures des contemporains de Sésostris et de Psammétichus. Nous ne serions pas étonné que le vice-roi, ayant une audience à donner en France, s’assît sur un trône orné de têtes d’éperviers et tînt en main un sceptre terminé en fleur de lotus. Cette année, comme en 1867, l’Égypte a logé son exposition dans une sorte de temple hypèthre, de style pharaonique, flanqué de deux pylônes massifs. Sur la muraille blanche, autour des fûts des colonnettes, aux encorbellemens des corniches et aux linteaux des portes, se détachent en couleurs claires les Osiris barbus, les Pascht à têtes de chat, les Isis à coiffures d’éperviers, les sistres, les croix ansées, les clés mystiques, les bâtons auguraux et autres figures de l’écriture hiéroglyphique. Quatre galeries s’ouvrent à l’intérieur autour de l’hypèthre, ou si on aime mieux du patio, cour à ciel ouvert que les Grecs, les Romains, les Turcs, les Arabes et les Espagnols, semblent avoir empruntée aux anciens Égyptiens. L’une de ces galeries est consacrée tout entière aux vues, aux plans, et aux modèles du canal de Suez. Les autres renferment les spécimens des productions naturelles de la grasse Égypte et les œuvres de son industrie. Aux portes pendent d’immenses portières rouges dignes des grandes proportions de l’édifice ; sur les parois s’étendent d’épais et magnifiques tapis merveilleusement nuancés ; sous les vitrines brillent les armes damasquinées, les soies brochées d’or, les étoffes zébrées de couleurs vives. Soulevons cette légère portière de cachemire bleu, brodée d’arabesques de soie multicolore, et pénétrons dans ce buen-retiro de sultane, tout meublé à l’orientale. Ce sont des bahuts et des cabinets, des armoires et des étagères de chêne et de cèdre, à marqueterie d’ébène et d’acajou, disposée en damiers et en losanges. Sur d’autres meubles à profil aigu, les incrustations de nacre, d’ivoire et d’argent remplacent les mosaïques de bois. Les rosaces compliquées et les devises arabes en caractères coufiques alternent comme