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communes de beaucoup de dépenses qui, partout ailleurs en Europe, incombent à l’état, et s’emparer en même temps du produit de certaines taxes qui, partout ailleurs, profitent tout entières aux caisses municipales. Ainsi deux lois de 1864 et de 1866 ont fait entrer l’état en partage avec les communes pour les droits d’octroi qui frappent toutes les matières de grande consommation, telles que les boissons, la viande, les farines, le riz, le sucre, le beurre, etc. Chargée de la perception, la commune en a toute l’impopularité ; mais elle verse à l’état près de la moitié de la recette. C’est dans le même esprit qu’une loi de 1874 a rendu à l’état les 15 centimes qui avaient été en 1870 attribués aux provinces sur l’impôt foncier. Au moment où s’aggravaient les charges des villes, l’état venait leur retirer des ressources dont elles s’étaient crues assurées[1].

Pour justifier ces tendances, l’état italien peut alléguer les exigences de sa situation, ses besoins plus grands que ses ressources. Ce qui est vraiment inexcusable, ce sont ces lenteurs et ces atermoiemens qui ont abouti à rendre inévitable une catastrophe que les ministres avaient, croyons-nous, un sincère désir d’empêcher. Ce fut en 1874 que, pour la première fois, le municipe de Florence s’adressa au gouvernement ; il lui demanda de remettre à la disposition de la ville certaines surtaxes dont l’état s’était emparé. Le ministère ne rendit rien ; il se contenta d’offrir des conseils, qui n’étaient même pas bons ; il suggéra des augmentations d’impôt. Celles-ci auraient eu pour effet de dessécher les sources déjà fort amoindries du revenu municipal ; elles n’auraient produit, sur quelques articles, que des bénéfices illusoires et passagers ; on ne tenta même pas l’expérience. Deux ans après, la gauche arrivait au pouvoir ; elle y avait été aidée par le vote de députés toscans qui, comme M. Peruzzi, avaient jusqu’alors appartenu à la droite. MM. Depretis et Nicotera paraissaient comprendre la nécessité de sauver Florence ; ils auraient tenu à honneur d’y parvenir ; ils nommèrent donc une commission. Celle-ci ne mit pas trop de temps à étudier l’affaire ; elle fit un rapport très judicieux qui avait le mérite d’aboutir à une conclusion pratique. Pour compenser l’insuffisance de l’indemnité jadis accordée, l’état, au moyen d’une émission de bons du trésor, prendrait à sa charge, jusqu’à concurrence de 30 millions, le service de la dette flottante qui pesait sur Florence ; le crédit de l’état étant très supérieur à celui de la ville, l’état, avec une dépense annuelle de 1,380,000 livres, satisferait les créanciers

  1. Nous tirons ces détails d’un intéressant article, riche de faits et de chiffres, qui a été publié sans signature dans les Débats du 23 juin 1878, sous ce titre : les Finances des communes italiennes.